Plus jamais d'invités ! ; Vita Sackville-West
Le Livre de Poche ; 213 pages.
Traduit par Micha Venaille. 1953.
Séance de rattrapage pour ce livre, lu il y a déjà plusieurs mois, mais qui vaut le détour. De Vita Sackville-West j'avais déjà dévoré Toute passion abolie, un texte plein de charme. Le Livre de Poche a eu la très bonne idée de nous offrir un nouveau roman d'elle il y a quelques mois, que je me suis empressée de découvrir.
Rose Mortibois, mariée depuis plus de vingt ans à Walter, un mari qui lui offre tout le confort matériel qu'elle peut souhaiter mais qui semble n'aimer que son chien, Svend, décide d'inviter sa soeur, le mari de cette dernière ainsi que leur fils qui revient des Indes, pour le week-end de Pâques. Gilbert, le frère de Walter, est présent également, ainsi que Juliet Quarles, une amie des Mortibois plutôt extravagante.
Les conversations entre ces individus qui se côtoient finalement peu d'ordinaire, ou alors de façon superficielle, vont faire voler en éclat la tranquillité de ce week-end à la campagne.
Ce qui m'a plu dans ce roman est sa légèreté feinte. Vita Sackville-West nous surprend en effet avec ses personnages, qui se révèlent peu à peu bien différents de ce que l'on imaginait au premier abord.
Dick et Lucy sont bien plus coincés que Rose et Walter en réalité. Rose est une femme honteuse de sa condition, et le contrat imposé par Walter la blesse bien plus qu'elle ne veut se l'avouer. Dick est plutôt en retrait. Quant à Lucy, qui donne l'impression d'être une femme ouverte en ménage et libre d'esprit, elle se retrouve finalement dans le rôle d'une bigote coincée, à côté de la plaque et ridicule. La scène où Rose lui parle d'un communiste et imagine qu'elle lui annonce qu'elle ne va pas à l'église pour Pâques est irrésistible. Seul Walter reste inatteignable, mais il est tout de même à l'image de tous ces gens "biens" qui peuplent le roman, à savoir une image qui se brise dès que l'on y regarde de plus près. Cette mise à jour des vrais visages des personnages du livre est favorisée par un point de vue changeant ainsi que par un usage recours appuyé aux dialogues.
C'est là qu'intervient Gilbert, le frère de Walter, image du savant un peu fou et décalé, qui n'en peut plus de voir sa belle-soeur malmenée.
"-Pauvre Rose, ce n'est pas une vie ! D'abord ce cocon qui ne se laisse pas approcher. Puis une chrysalide toute raide sur son lit, enfin un papillon qui s'envole jusqu'au Palais de Justice où vous ne pouvez plus le poursuivre avec vos bouillottes et votre arrow-root."
Les thèmes abordés par ce roman qui semble un peu léger sont pourtant très sérieux. La sexualité, la religion, les relations conjugales et filiales, le pourquoi de l'existence imprègnent les dialogues entre les personnages.
Il ne s'agit pas d'un roman extraordinaire, mais j'y ai trouvé une histoire attachante peuplée de personnages que j'aurais apprécié voir davantage dévoilés.
L'avis de Papillon.