La Terre - Emile Zola
Jean Macquart, ayant cessé d'être soldat, s'installe dans la Beauce. Il y rencontre les Fouan, qui ont divisé leurs biens entre leurs trois enfants. Il y fait également la connaissance de Françoise, et se prend à espérer s'établir dans cette région étrangère.
La Terre est l'un des Zola qui m'intimidaient le plus tant sa noirceur semble avoir rebuté les lecteurs. Je l'ai finalement beaucoup aimé, même s'il n'a pas les moments de poésie ou de révolte qui illuminent d'autres romans particulièrement durs de la série.
Les éléments, qu'il s'agisse de la nature, d'art ou d'argent, qui obsèdent les individus zoliens, sont très présents dans La Terre. On assiste à des luttes à mort pour des héritages, qu'ils soient familiaux ou non. Chacun soupçonne les autres du pire, et aucun lien d'amour ne parvient à survivre dans ce milieu pourri, tellement éloigné de la religion et des quelques principes moraux qu'elle pourrait inspirer, que même les hommes d'église le fuient. La terre obsède les personnages, qui ont avec elle un rapport presque charnel. Ils sont à sa merci, et ne peuvent que respecter ses injustices.
Pour nuancer mon enthousiasme, c'est la première fois que je trouve l'auteur aussi caricatural. Les paysans de la Beauce sont sans cesse comparés aux animaux qu'ils côtoient, et le contraste n'est pas en leur faveur. Le viol, l'inceste, le meurtre ne les inquiètent que dans la mesure où cela pourrait nuire à leur intérêt.
Le seul qui m'a un peu attendrie est le père Fouan, ce vieil avare qui observe peu à peu sa perte, le dépouillement que lui font subir ses enfants et l'effacement progressif de sa personne engendré par sa vieillesse.
Mais Zola n'écrit pas seulement pour nous livrer une vision épouvantable des campagnes françaises. A travers ses personnages, c'est la lutte pour la survie du monde agricole dans une économie qui se mondialise et qui fait rémunérer les paysans à un prix au mieux dérisoire, au pire inférieur à ce que la production lui a coûté (on se croirait en 2024). L'union avec les ouvriers de Germinal est impossible, puisque leurs intérêts sont incompatibles, la famine des uns étant la seule garantie de la difficile survie des autres.
Folio. 589 pages.