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lilly et ses livres

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18 décembre 2006

Adieu ; Alfred de Musset

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La Pie ; Claude Monet

Adieu

Adieu ! Je crois qu'en cette vie
Je ne te reverrai jamais.
Dieu passe, il t'appelle et m'oublie ;
En te perdant je sens que je t'aimais.

Pas de pleurs, pas de plainte vaine.
Je sais respecter l'avenir.
Vienne la voile qui t'emmène,
En souriant je la verrai partir.

Tu t'en vas pleine d'espérance,
Avec orgueil tu reviendras ;
Mais ceux qui vont souffrir de ton absence,
Tu ne les reconnaîtras pas.

Adieu ! tu vas faire un beau rêve
Et t'enivrer d'un plaisir dangereux ;
Sur ton chemin l'étoile qui se lève
Longtemps encor éblouira tes yeux.

Un jour tu sentiras peut-être
Le prix d'un
coeur qui nous comprend,
Le bien qu'on trouve à le connaître,
Et ce qu'on souffre en le perdant.

Alfred de Musset

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17 décembre 2006

Des livres... toujours des livres...

2070718883Semaine fructueuse en achats de livres. Ce qui est d'autant moins raisonnable que2268056279 je vais en avoir pour Noël... Mais j'ai des excuses, si si !!! Par exemple, Les confessions d'un mangeur d'opium anglais, de Quincey... Et bien, il me permet de mettre un titre à la lettre Q pour mon Challenge 2007. Et puis Alice et son jardin secret, j'en rêve depuis des mois, et là je l'ai trouvé à un prix ridicule dans une bouquinerie. Et La tournée d'automne de Jacques Poulin, ça me permet d'apprendre des choses sur le Québec. Après, c'est vrai que Le fantôme de Canterville d'Oscar Wilde, Impératrice de Shan Sa, La petite robe de 226616807XPaul de Philippe Grimbert, Une seconde avant Noël de Romain Sardou, et Histoires de Noël de Bernard Clavel, ce n'est pas autant excusable...2226118616 Sans compter les emprunts à la bibliothèque... Depuis septembre, ma PAL a doublé de volume, et je dois consacrer une étagère pour les entasser. Mais comme je n'aime pas culpabiliser, j'ai décidé de vous rendre responsable de ces achats insensés...
Plus je lis vos articles, plus j'ai envie de lire des livres. Plus vous me montrez que ce n'est pas si dépassé d'aimer lire, et plus je lis... Vous m'avez entraînée dans un cercle vicieux, et mon compte en banque et moi nous vous en voulons beaucoup beaucoup beaucoup...ImpératriceLa Petite Robe de PaulLe fantôme de canterville

17 décembre 2006

On s'est déjà vu quelque part ? Nuala O'Faolain

2264038322Edition 10/18 ; 314 pages.
7,80 euros.

" Née à Dublin au début des années 1940, dans une famille de neuf enfants, Nuala O'Faolain se décrit comme "l'Irlandaise type : une pas grand-chose, issue d'une longue lignée de pas grand chose, de ceux qui ne laissent pas de traces" : devenue chroniqueuse à l'Irish Times, après un brillant parcours universitaire et journalistique, elle raconte ici, avec simplicité, spontanéité, humour et beaucoup de modestie, comment elle n'est pas devenue une Irlandaise type.
Entre un père journaliste, figure désinvolte et absente, et une mère alcoolique accablée par les difficultés d'un quotidien précaire, la jeune Nuala se fraie, de petits boulots en combines, un chemin jusqu'à l'université et trouve un premier travail à la télévision. Elle vit à Londres les années 1970 du féminisme et de la cassure politique entre l'Irlande et la Grande-Bretagne.
Devenue une journaliste reconnue, Nuala O'Faloain n'écrit cependant pas une success story, bien au contraire : au fil des aventures sentimentales sans lendemain, des plongées dans l'alcool, elle dit avec une honnêteté scrupuleuse son extrême solitude, son incapacité à se détacher du modèle maternel et l'impossibilité de trouver l'âme sueur qu'elle cherche avec un sentimentalisme souvent à l'opposé d'un féminisme exacerbé... Avec ses contradictions (qu'elle pointe avec humour), ses doutes, ses enthousiasmes, ses excès, ses souffrances et ses passions - la lecture en est une, et pas des moindres -, Nuala O'Faolain construit un livre qui va droit à l'essentiel : son humanité sans fard. "

Encore une bonne surprise avec cette auteure. Nuala O'Faolain évoque son pays, l'Irlande, qu'elle a vu vivre des moments très importants de son Histoire. Mais elle est aussi témoin d'une époque de bouleversements des moeurs, des façons de penser, et pas seulement en Irlande mais aussi en France ou en Angleterre. Enfin, Nuala O'Faolain écrit une vie de femme, qui correspond à ce que beaucoup d'autres femmes ont vécu.
On sent que ce récit chargé d'émotion a pour but de soulager son auteur. Nuala O'Faolain nous raconte les choses simplement. Ses blessures, ses expériences, elle nous les fait partager. Avec humilité, elle ne cherche pas à nous épater avec des mots grandiloquents. Mais on sent surtout qu'elle cherche à être honnête avec elle même. Elle veut comprendre comment une jeune fille qui avait la tête pleine de rêves, qui voulait être désinvolte, est devenue ce qu'elle est aujourd'hui.
Elle réalise qu'elle regrette, par certains côtés, d'avoir rejeté aussi catégoriquement le modèle de ses parents. Ce modèle qu'elle a pourtant, sous certains aspects, reproduit en sombrant dans l'alcool, comme sa mère, pendant quelques années. Ce modèle qui, bien qu'il la terrifiait, l'attirait aussi. Elle ne s'est jamais mariée, n'a pas eu des enfants à la chaîne, et pourtant, même lorsqu'elle détestait ses parents, ou plutôt leur vie, elle a rêvé mariage heureux et enfants. A la fin de son livre, on se dit que son existence à elle a abouti au même  résultat, la solitude. Et la sienne est peut-être encore plus grande. Ses parents, elle le dit, avaient des moments où ils se retrouvaient, même si c'était rare, même si ce n'était que pour encore moins se comprendre le lendemain. Elle, elle est souvent seule. Elle n'a pas le privilège, si faible soit-il, de partager ces moments où la présence de l'Autre permet de faire abstraction de tout le reste.
Nuala O'Faolain écrit pour parler de sa réconciliation avec son pays, malgré toutes les humiliations subies, tout ce que signifiaient ses racines. Parce que l'Irlande est une partie intégrante d'elle même, et que la rejeter consisterait à se rejeter elle même. Elle nous raconte comment elle a fini par admettre combien elle aimait l'Irlande, et combien elle est Irlandaise.
En lisant ce livre, je réalise a quel point Nuala O'Faolain parle d'elle dans Chimères. Mais ce n'est pas du tout lassant d'entendre parler d'elle, parce qu'elle ne dresse pas un portrait narcissique d'elle même. Elle nous parle de ce qu'elle représente, de ce qu'elle a de commun avec nous Ou plutôt, d'une personne qui vit dans le même monde que nous, et qui l'affronte, avec ses réussites, ses échecs, ses doutes et ses craintes.
Est-ce que je sous-entend que la vie de Nuala O'Faolain est un gâchis ? Absolument pas. Il ne s'agit que d'un livre, on ne se livre jamais totalement, il est très probable que le fait de parler surtout des épreuves surmontées est un parti pris. Elle ne s'étend pas sur les moments heureux, mais on sent qu'il y en a eu. C'est une femme qui a mené sa vie, avec plus ou moins de maladresse, mais elle a osé le faire. Elle a connu des déceptions, mais c'est parce qu'elle a tenté. Aujourd'hui, elle est un écrivain reconnu. Et si elle est un peu dure avec elle même, je préfère penser que c'est surtout par modestie.

14 décembre 2006

Coup de foudre à Bollywood (Bride and Prejudice) ; Réalisé par Gurinder Chadha

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Acteurs : Aishwarya Rai (Lalita), Martin Henderson (William Darcy), Daniel Gillies (Johnny Wickham), Naveen Andrews (Balraj), Namrata Shirodkar (Jaya).

Musique : Anu Malik.

Durée : 107 minutes.

" Mme Bakshi n'a qu'une seule idée en tête : marier les aînées de ses quatre filles - Jaya et Lalita. Mais pas n'importe comment ! Comme toute bonne mère, Mme Bakshi est exigeante : son futur gendre se doit d'être indien et surtout... riche. Mr. Balraj, leur nouveau voisin fraîchement revenu de Londres, ferait à ce titre un prétendant parfait pour Jaya, l'aînée. Sa soeur Lalita, quant à elle, tient tête à sa mère : elle ne se mariera que par amour. Lors d'une des nombreuses fêtes extravagantes offertes par les Bakshi et leur voisin, Lalita rencontre Darcy, le meilleur ami de Balraj. Il a tout pour plaire ou presque... Ce bel hôtelier n'a que deux défauts : il est américain et fiancé. Si Darcy tombe immédiatement sous le charme de la belle Lalita, les sentiments de celle-ci sont plus mitigés... "

Vous l'aurez compris en lisant le résumé, ce film s'est inspiré d'Orgueil et Préjugés. Je m'attendais à une comédie un peu folle et simplement amusante, en fait je me suis régalée. Le roman de Jane Austen n'est repris que pour la structure de l'histoire. Le film se passe essentiellement en Inde mais aussi aux Etats-Unis, à notre époque. Pour nos deux héros, ce sera surtout la barrière entre deux cultures qui sera difficile à franchir.
J'ai beaucoup aimé retrouver des scènes de l'adaptation BBC, les personnages du roman. Et je trouve les deux acteurs principaux sublimes. Même si mon coeur de fille battait davantage pour William Darcy, je comprend pourquoi Ashwarya Rai a été Miss Monde... Ce Darcy est Américain, il travaille, il sait bien jouer des poings. Et puis, c'est un sacré gaffeur aussi...
Johnny Wickham est tout aussi dépravé que dans le livre, mais pas de la même façon. Heureusement, Lakhi est seulement naïve, et non stupide comme dans le roman.
Mais il y a quand même un "Mr Collins" et une "Mme Bennet" pour embarrasser tout le monde. Et pas qu'un peu d'ailleurs... D'ailleurs, j'ai beaucoup ri de voir à quel point "Mr Collins" était tourné en ridicule dans les chansons, même s'il se calme quand il se marie.
La principal intérêt de ce film, ce sont toutes ces couleurs, cette musique, ces costumes, cette ambiance chaleureuse que l'on ne trouve pas dans les films hollywoodiens. Je n'avais jamais vu de film bollywoodien, je ne m'attendais pas du tout à ça.
J'aime beaucoup la scène où Lalita dit à William qu'elle refuse de l'épouser. La musique est sublime lorsqu'elle s'en va.
L'alternance entre des musiques orientales et plus classiques est parfaite, les scènes de rêve aussi. Et même si c'est une parodie, j'ai cru sans peine à ce conte de fée.

13 décembre 2006

Le menteur ; Henry James

2070319873Edition Folio 2 euros ; 116 pages.
2 euros.

L'histoire est celle d'Oliver Lyon, peintre, qui se rend chez Sir David, afin d'y effectuer son portrait. Là bas, il retrouve Everina, celle qu'il a aimé douze ans auparavant, en Allemagne. Elle avait alors refusé de l'épouser, par orgueil nous dit-il. Everina est accompagnée de son mari, le Colonel Capadose, dont elle est clairement amoureuse. Pourtant, il devient vite évident que le Colonel est un menteur incorrigible. Tout le monde le sait, mais personne ne semble vouloir mettre le Colonel dans l'embarras. Et pour cause, ses mensonges ne blessent personne. Oliver Lyon décide, une fois rentré à Londres, de demander au Colonel de poser pour lui. Celui-ci accepte, sans se douter que Lyon a décidé de peindre un portrait révélant sa nature de menteur.
Pourquoi vouloir nuire au Colonel ? Parce que Lyon est toujours sensible au charme de son épouse, parce qu'il est jaloux, parce qu'il veut la reconquérir ou peut être simplement la blesser, si elle ne réagit pas comme il s'y attend. Il veut la voir admettre que son mari est un menteur, et il rêve de la voir admettre qu'elle aurait été plus heureuse avec lui.
Ce livre est assez pénible à lire. Nous sommes entourés de personnages peu attachants. Le Colonel Capadose est agaçant avec ses mensonges, Mrs Capadose est irritante par sa passivité. Et même Oliver Lyon semble plus amer et vengeur qu'amoureux. J'avais beaucoup aimé Daisy Miller  du même auteur, mais j'avais réussi à entrer dans l'histoire. Daisy Miller m'avait émue. Ici, je n'avais qu'une envie, celle de quitter au plus vite ces personnages égoïstes et gonflés de leur bêtise et de leur malhonnêteté.
Parce que finalement, même si Olivier Lyon rougit à chaque fois qu'il dissimule la vérité, et même s'il ne ment pas de façon directe, il entre dans le jeu du Colonel. Et de ce fait, il devient aussi méprisable que celui qu'il méprise. Et même pire. Alors que le Colonel mentait sans nuire à personne, et sans amener sa femme à faire de même, Lyon va le pousser à se défaire d'une situation embarrassante en impliquant une personne extérieure. Everina, quant à elle, ne pourra que prouver son affection pour son mari en le couvrant. Dégoûté, Lyon n'aura dès lors plus qu'à partir et à s'en prendre à lui même. Et en tournant la dernière page, j'ai eu envie de lui dire qu'il ne l'avait pas volé !

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12 décembre 2006

Le mépris ; Alberto Moravia

2290335061Librio ; 154 pages.

" Capri ! Au pied des Faraglioni, l'île rayonne d'azur et de sérénité. Pourtant le drame couve entre Emilia et Riccardo. Perdu dans les méandres d'un scénario sur l'Odyssée, Riccardo sent sa femme se détacher de lui. Emilia ne l'aime plus. Pire, elle le méprise. Drôle de coïncidence ! Riccardo voit soudain sa propre vie se superposer à son scénario. Si Ulysse tarde à revenir à Ithaque, c'est par crainte de revoir Pénélope, sachant qu'il doit la reconquérir. Reconquérir Emilia ! Voilà bien l'unique obsession de Riccardo ! Emilia ! Sait-il seulement ce qui l'agite ? Désenchantement ? Ennui ? Lassitude ? Attirance secrète pour Battista, le fastueux producteur ? Dans " le ciel bleu du mépris ", l'orage gronde... "

J'ai un peu de retard dans mes critiques, j'ai eu un début de semaine assez chargé. Pourtant, je n'ai pas pu lâcher ce livre avant de l'avoir fini. A priori, il n'avait rien pour me tenter. Un homme qui souffre parce que sa femme ne l'aime plus, et même, le méprise, ça ne m'attire pas forcément, et je ne connaissais pas du tout l'auteur. Puis j'ai débattu de façon totalement puérile avec un autre blogueur sur la mentalité féminine (oui, je sais, c'est très mal de généraliser), après le billet de Céline sur ce livre. Et comme j'avais parfaitement conscience que, n'ayant lu le livre ni l'un ni l'autre, nous étions certainement tous les deux hors du sujet traité, j'ai décidé de me procurer ce livre.
Et là, véritable coup de foudre. Certains ont déjà commencé leur bilan de l'année 2006, moi j'attendrai jusqu'au bout, de belles surprises peuvent encore m'attendre. Que ce livre est beau ! Qu'il est bien écrit ! Je n'avais pas ressenti un tel bonheur en lisant un livre depuis quelques temps. Il y a les livres que l'on adore pour leur histoire, pour le style de l'auteur, mais qui n'ont quand même pas cette étincelle supplémentaire qui fait que nous avons l'impression de complètement plonger dans le livre, que nous le lisons même en marchant dans la rue...
C'est vrai, ce n'est pas un thème très gai. D'autant plus que nous souffrons avec Riccardo, qui est méprisé, qui aime sans l'être en retour. Et le pire, c'est qu'il ne comprend pas pourquoi. Il aime toujours sa femme, a acheté une maison et une voiture qu'il est incapable de payer, pour elle. Pour lui permettre ce bonheur, il accepte de devenir scénariste, métier qu'il exècre. Et alors qu'il lui prouve son amour, elle se met à faire chambre à part. Au début, elle nie tout changement dans ses sentiments. Et puis, un jour qu'il la harcèle de questions, elle lui lâche ces mots assassins "Je ne t'aime plus", et pire encore, "Je te méprise". Nous, lecteurs, nous nous doutons assez rapidement de la raison de ce mépris, même s'il est difficile de concevoir qu'un pareil mépris puisse avoir pour origine un malentendu aussi évident. En fait, la fin tragique nous prive d'une véritable explication.
Alors, comme pour L'Odyssée, il faut faire des hypothèses. Car Ricardo se retrouve à travailler sur un scénario mettant en scène une partie de L'Odyssée, le retour périlleux d'Ulysse, chez lui, à Ithaque, après la Guerre de Troie. Il se rend alors à Capri, avec Emilia qu'il espère toujours reconquérir, dans la villa de Battista, son producteur. Riccardo veut faire un film "psychologique", tout comme Rheingold, avec qui il travaille sur le scénario. Et c'est là que le parallèle entre les deux histoires commence. Rheingold pense que Pénélope méprise Ulysse parce qu'il n'a pas su être "l'Homme" qu'elle s'imaginait. Riccardo Molteni mêle alors de façon très étroite et peut-être totalement fausse son histoire à celle d'Ulysse et de Pénélope. Parce qu'il ne comprend pas Emilia, il explique son mépris grâce à ce qu'il finit par croire de Pénélope.
Ce qui est le plus douloureux pour Riccardo, c'est qu'il aime Emilia comme avant, et peut-être plus encore. Et elle même semble ne pas toujours penser ce qu'elle dit. Il n'arrête pas de lui poser les mêmes questions, pour lui faire dire ce qu'elle n'a pas envie de lui dire, et pour entendre ce qu'il n'a pas envie d'entendre. Dans ces histoires, il est difficile de détacher ce qui est vrai de ce que l'on veut croire. Riccardo, parce qu'il ne saura jamais la vérité, finira par écrire sa propre version, afin qu'Emilia puisse "se pencher vers moi comme une belle image consolante", nous dit-il. Et le livre s'achève sur une note pleine d'espoir.
Je ne sais pas si ma critique vous donne envie de le lire, il m'est très difficile de vous décrire ce qui m'a plu, c'est surtout du ressenti. Je peux seulement vous dire que c'est un livre captivant qui m'a fait totalement oublier ce qui m'entourait pendant quelques heures. Et malgré son thème douloureux, j'en suis ressortie avec le sourire...

Allez voir l'avis de Céline, son analyse est beaucoup plus fine que la mienne, et elle connaît l'Ulysse de Dante.

11 décembre 2006

La nuit ; Claude Roy

Souvenir d'école...

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La nuit étoilée ; Vincent Van Gogh

La nuit

Elle est venue la nuit de plus loin que la nuit
A pas de vent de loup de fougère et de menthe
Voleuse de parfum impure fausse nuit
Fille aux cheveux d'écume issus de l'eau dormante

Après l'aube la nuit tisseuse de chansons
S'endort d'un songe lourd d'astres et de méduses
Et les jambes mêlées au fuseau des saisons
Veille sur le repos des étoiles confuses

Sa main laisse glisser les constellations
Le sable fabuleux des mondes solitaires
La poussière de Dieu et de sa création
La semence de feu qui féconde les terres

Mais elle vient la nuit de plus loin que la nuit
A pas de vent de mer de feu de loup de piège
Bergère sans troupeau glaneuse sans épis
Aveugle aux lèvres d'or qui marche sur la neige

Claude Roy

10 décembre 2006

Marine, je me souviendrai de toi ; Jacqueline Mirande

Édition Le Livre de Poche ; 151 pages.

" 1789. Marine, jeune fille de quinze ans du Paris populaire, découvre l'amour en la personne de François-Régis de Sénanque. Attirée par l'homme, elle se sent pourtant repoussée par ses manières aristocratiques. Fidèle à ses convictions révolutionnaires, pure, mais sans fanatisme, elle préfère épouser un homme qu'elle n'aime pas, issu du peuple, comme elle.
Quand sonnera l'heure de la Grande Terreur, c'est pourtant François-Régis, l'aristocrate, qui sauvera la tête de Marine. Au long de ces jours amères faits de luttes contradictoires, de douleurs, de reniements, d'intolérance, les deux héros inconciliables découvrent peu à peu la seule cause qui vaille d'être défendue : l'amour. "

Parmi mes lectures d'enfants, j'ai retrouvé ce petit livre, que j'ai dévoré ce matin pour la je-ne-sais-combientième fois. Et à nouveau, je suis tombée sous le charme de ce marquis de Sénanque, qui tombe amoureux fou de cette miséreuse aux yeux violet, Marine, dans le contexte troublé de la Révolution. Un amour qui symbolise les changements de la société, la chute des barrières sociales espérés. Si la Révolution n'apporte pas ce que tout le monde attendait, et s'achève par un retour en arrière très rapide, Marine et François-Régis auront eu le temps de faire leur propre révolution et de s'aimer.
Si le suspens n'est pas très grand en ce qui concerne la relation entre nos deux héros (pourtant je marche à chaque fois...), je trouve que Jacqueline Mirande a très bien su utiliser cet amour pour nous parler de la Révolution. Nous pénétrons dans le monde du petit peuple, de la Noblesse qui n'avait plus que ses titres et qui se retrouve ruinée et souvent obligée de fuir, mais aussi de la société très instable des années 1792/1794. La guerre avec les monarchies étrangères, la guerre civile, la Terreur, les rivalités entre les députés sont abordés, sans donner détails sanguinolents (c'est un livre pour 11 ans et plus...), mais sans non plus cacher les atrocités commises (viols, guillotine qui marchent en permanence, corruption...).
En seulement 151 pages, Jacqueline Mirande nous dresse le constat des abus de la Révolution, de ses contradictions. Dans les prisons révolutionnaires se mêlent anciens nobles, nouveaux bourgeois, députés déchus, gens du peuple, et même généraux révolutionnaires triomphants, symbolisant ainsi les dérives et l'échec de la Révolution. Si celle-ci a permis la naissance de nouvelles idées qui devront désormais être prises en compte, à la fin du livre, la République est déjà instable et prête pour un coup d'Etat...

9 décembre 2006

La note sensible ; Valentine Goby

207031331X

Edition Folio ; 242 pages.
6,60 euros.

" Je n'ai jamais connu de vous qu'un univers sonore, où dominaient Mozart et votre violoncelle. Vous jouiez. Les voix chantaient. J'écrivais. Votre musique est dans ce manuscrit. A vous entendre, j'ai eu peur de vous aimer. Je vous ai fui. J'ai écrit ce qui aurait pu être notre histoire. Ne me demandez pas pourquoi. Je ne vous demande pas pourquoi vous avez joué pour moi du violoncelle, chaque soir, pendant des mois. Quand vous aurez terminé votre lecture, je serai nue devant vous, et pourtant moins vulnérable qu'au soir du 15 octobre. Je n'aurai plus rien à dissimuler, pas même de l'amour. "

Ceci est un extrait de la lettre qu'Inès écrit à son voisin Vendello, pour lui raconter leur histoire d'amour, ou plutôt celle qui aurait pu être. Parce que, " A mi-chemin entre ma chambre et la porte d'entrée, une latte a grincé " , écrit Inès. Et de là se sont créées deux Inès. Celle, la vraie, timide et rêveuse, qui n'a pas osé ouvrir la porte. Et puis celle qui l'a fait, qui vit sous la plume de la première.
C'est un joli petit rêve que nous raconte Valentine Goby, avec une écriture délicate. Il ne manque presque rien pour que je trouve ce roman plein de poésie. La musique, la peinture, le rêve sont bien présents. Et puis certains passages sont vraiment très beaux. Je pense que Valentine Goby a juste besoin d'un petit rien pour que son écriture soit pleine de la sensibilité que je cherchais dans ce livre. Mais c'est aussi ma faute, je voulait vraiment adorer ce roman, toutes les critiques étaient fantastiques. J'avais vraiment envie d'une héroïne plus naïve plus enfantine. En écrivant je réalise qu'elle l'est en fait. Celle que je trouve attachante, c'est celle qui écrit la lettre. Celle qui appartient à un rêve ne peut pas être une rêveuse timide, puisqu'elle ose ouvrir la porte. Elle a forcément plus d'assurance, même si parfois elle se laisse aller à quelques faiblesses, quelques rêves, et redevient elle même (la vraie Inès). Parce que l'on ne peut pas être ce que l'on voudrait être, ce qui n'est pas nous, ou alors pas longtemps, on ne peut être que soi même. Alors dans l'histoire d'amour rêvée, Inès et Vendello sont deux parts d'Inès. L'une qui s'invente une identité qui n'est pas la sienne, et l'autre qui la démasque. Et Inès, la vraie, ne peut avouer ce qu'elle est, ce qu'elle ressent, qu'avec une lettre pleine de poésie et d'espoirs simples. 

" - Tu es le demi-ton. Tu es l'entre-deux, la note suspendue, l'équilibre fragile. Tu es le vacillement qui contient la chute, tu es le fa dièse qui frôle le sol, un presque sol ; tu es la défaillance retenue d'extrême justesse, tu es le bord de l'abîme. Tu es tout ce qui pourrait être et qui n'est pas, tu es un possible. Tu es cette note en mouvement obligé vers une autre, qui voudrait se confondre avec elle et ne se confond pas. Tu es l'incertitude. Tu es la note sensible. "

J'espère que mon commentaire est intelligible, malgré mon évolution en cours de route...
Florinette a retranscrit la lettre dans son intégralité, et m'a fait découvrir ce livre.

8 décembre 2006

Les créatures de la terre ; John McGahern

2253082791

Edition Le Livre de Poche ; 152 pages.
5,50 euros.

" Les " créatures de la terre " sont des êtres ordinaires confrontés aux situations élémentaires de la vie, et qui peuvent révéler des gouffres de méchanceté ou de bêtise, aussi bien que des trésors de bonté. Allez savoir... John McGahern nous offre, à travers trois nouvelles, une série de portraits hauts en couleur : deux vagabonds capables de tuer des animaux innocents, sans même savoir pourquoi ils le font ; deux policiers chargés d'arrêter l'homme qui leur offrait, en toute amitié, des billets pour la coupe de l'Ulster ; trois frères contraints d'assister aux obsèques d'un oncle qu'ils détestaient... Prenant prétexte de situations simples sinon banales, le grand romancier irlandais explore les thèmes de la solitude, de l'abandon, de l'incompréhension entre les êtres. Bien que sa vision du monde soit sombre, son humour et son exceptionnel talent de conteur éclairent ces récits d'une lumière contrastée comme celle qui ennoblit les paysages d'Irlande. "

C'est Yvon qui m'a conseillé cet auteur. Oui, en ce moment, j'achète beaucoup de livres grâce aux critiques que j'ai lues... Bref, donc, j'ai lu ce recueil de nouvelles, et j'ai beaucoup aimé. Le rythme est assez lent, mais l'atmosphère rappelle bien l'Irlande embrumée, les paysages de campagne, les tourbières, l'herbe très verte, les moutons. Chacune des nouvelles nous donne le sentiment de débarquer au milieu de l'histoire, notamment la deuxième, où l'on comprend ce qui se passe seulement vers la fin. Finalement, ces gens sont un peu comme nous, ils vivent leur vie, n'ont rien d'extraordinaire, mais nous la font quand même un peu partager. Puis, ils ressortent de notre lecture, comme ça, sans nous dire comment l'histoire finira. L'auteur nous donne une vision assez pessimiste du monde, des hommes surtout, qui agissent sans scrupules, qui n'hésitent pas à manipuler ou à céder à la cruauté et à l'hypocrisie. Cependant, j'ai beaucoup apprécié l'écriture pleine de poésie et de piquant d'une certaine manière de John McGahern.

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