What I Loved (Tout ce que j'aimais) - Siri Hustvedt
Leo et sa femme Erica sont écrivains. Lorsque Leo achète une oeuvre de Bill Wechsler, un artiste qu'il trouve prometteur, une amitié se noue entre les deux hommes. Elle durera toute leur vie et mêlera Erica, Lucille et Violet (les deux épouses de Bill), ainsi que les fils presque jumeaux des deux familles, Matt et Mark.
La vie d'artistes dans le New York des années 1970 (même si l'histoire se déroule sur vingt ans), on peut dire qu'il n'y a priori pas plus cliché. Mais l'autrice retourne ce postulat avec un texte qui interroge le rôle de l'art dans un monde où le qualificatif d'oeuvre repose parfois plus sur la provocation et les bonnes relations que sur le talent.
Tout ce que j'aimais est un livre qui nous rappelle que la frustration et le doute sont inhérents à la condition humaine. Lorsque le nom d'Henry James finit par être cité, l'entreprise de l'autrice devient encore plus évidente. Siri Hustvedt essaie de tourner autour des scènes qu'elle décrit pour nous en faire percevoir les enjeux. Les personnages se rencontrent à l'âge adulte. Ils évoluent professionnellement et personnellement, au gré des rencontres et des drames de la vie. Ils essaient de grandir, d'utiliser l'art pour arrêter le temps.
Mais la réalité n'est qu'une perception subjective et éphémère. Elle évolue parfois jusqu'à se montrer contradictoire avec ce que l'on savait (ou croyait savoir). Elle dépend des autres, sans lesquels nous n'existons pas vraiment et avec lesquels nous jouons à un jeu de miroirs déformants. Nous incarnons souvent des rôles différents, dépendants des besoins des autres : un professeur pour ses élèves, un patient pour son médecin, un mausolée pour un absent. Lorsque l'illusion s'effondre, la déception est terrible. Et parfois, nous ne pouvons que la deviner et la redouter.
Pour être complètement honnête, j'ai trouvé qu'Hustvedt oubliait un peu son fil conducteur pour plonger dans le mauvais thriller dans la dernière partie du livre, mais je garderais surtout le souvenir d'un livre complexe et nostalgique, bien plus convaincant qu'Un été sans les hommes.
Sceptre. 370 pages.
2003.