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lilly et ses livres
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27 octobre 2021

Nous avons toujours vécu au château - Shirley Jackson

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Les Blackwood font partie des familles les plus aisées de la région. On les hait pour cela. Depuis quelques années, il n'y a plus que Mary-Katherine qui sort faire les courses deux fois par semaine, sous les regards narquois et terrifiés des gens. Ensuite, elle referme le verrou qui empêche les intrus de pénétrer dans son immense propriété et retourne se terrer avec son oncle Julian et sa soeur Constance. Ils sont les seuls survivants.

Toujours dans l'ambiance du Challenge Halloween, j'ai sorti ce livre des tréfonds de ma PAL avec beaucoup d'attentes. De Shirley Jackson, j'avais lu une seule nouvelle, La Loterie, qui m'a marquée à jamais. Je n'ai pas trouvé dans ce roman le récit d'horreur que j'attendais, mais cette lecture est tout de même très dérangeante à sa façon.

Nous avons toujours vécu au château est un conte, sans lieu ni époque. Il pourrait être une métaphore pour d'inombrables situations. L'autrice nous plonge dans un univers ambigu, malsain, mêlant méchanceté humaine et rumeurs. Les habitants du village se comportent de façon ignoble envers la jeune Mary-Katherine, la harcelant et poussant les enfants à le faire. Le rapport de force n'est cependant pas si simple à évaluer. Les Blackwood sont aussi en position dominante sur leur territoire et aiment le rappeler. Même après les événements qui surviennent, ils apparaissent comme des demi-dieux capables de détruire ceux qui les ont offensés.

Ce livre flirte avec le surnaturel avec brio. On ignore s'il se déroule dans un monde où les sortilèges existeraient ou s'il ne décrit que des manies enfantines.  Il met en scène des êtres dont on ne sait s'ils sont fous ou hors de la réalité. La vérité est relative et Shirley Jackson distille les informations au compte-goutte.

Un texte d'autant plus déstabilisant qu'on ne sait de quel côté le couperet va tomber, et qui nous offre une vision de la nature humaine des plus sombres.

Rivages. Traduit par Jean-Paul Gratias.
234 pages.
1962 pour l'édition originale.

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24 octobre 2021

La Saga des Cazalet. 4. Nouveau départ - Elizabeth Jane Howard

Nouveau départ

Alors que la guerre s'achève, les habitants de Home Place retournent à Londres. Certains secrets nés durant cette période si particulière sont enfouis profondément alors que d'autres s'apprêtent à être révélés. Chacun cherche à trouver sa place dans ce monde nouveau.

Depuis maintenant un an et demi, je retrouve les Cazalet avec un immense plaisir. Encore une fois, j'ai lu ce livre très facilement, même si je dois reconnaître que les tomes précédents m'avaient davantage conquise.

Je crois que les multiples rebondissements ne me passionnent plus autant qu'avant et certains chapitres m'ont ennuyée. Je n'ai pas compris pourquoi Dolly avait droit à quelques interventions, alors que la Duche, qui aurait eu toute sa place, reste presque muette. Par ailleurs, j'attendais depuis le premier tome qu'un très grave événement bénéficie d'un traitement, mais ce n'est pas le cas et je ne comprends pas ce parti pris de l'autrice. 

Malgré cela, mon avis général est très positif. Les ficelles de la saga sont toujours efficaces. J'aime voir se dessiner dans le fond de l'intrigue les bouleversements politiques et sociaux de l'Angletere, même si nous suivons des individus très protégés par leur position sociale. On assiste à la chute de Churchill, les conséquences de la guerre sont encore très présentes, les hommes sont démobilisés, les domestiques cherchent une nouvelle voie.

Dans cette saga multipliant les points de vue et s'étendant sur de nombreuses années, on a pu observer une véritable évolution des personnages. Elizabeth Jane Howard aime la nuance, surtout dans ses personnages féminins et dans les couples qu'elle met en scène. Ainsi, bien que j'éprouve beaucoup de mépris pour Diana et Edward, l'évolution de leur relation et leurs motivations à être ensemble sont très bien analysées. Il en va de même concernant l'union entre Rupert et Zoe. Les relations parents-enfants sont moins réussies en revanche dans ce tome, plutôt superficielles et toujours dans le même registre.

Il reste un dernier tome à lire, dont la traduction est prévue pour l'année prochaine. Ecrit longtemps après, je dois admettre que je suis un peu méfiante, même si je sais que je ne résisterai pas à l'envie de retrouver les Cazalet.

La Table Ronde. 600 pages.
Traduit par Cécile Arnaud.
1995 pour l'édition originale.

20 octobre 2021

De sang froid - Truman Capote

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"Comme les eaux de la rivière, comme les automobilistes sur la grand-route, et comme les trains jaunes qui filent à la vitesse de l’éclair sur les rails du Santa Fe, la tragédie, sous forme d’événements exceptionnels, ne s’était jamais arrêtée là. "

Le matin du 15 novembre 1959, la tranquille communauté de Holcomb, au Kansas, est frappée d'horreur. Quatre membres de la très respectable famille Clutter ont été ligotés avant d'être abattus d'une balle dans la tête. En raison de la gravité du crime, le K.B.I. est saisi de l'affaire.

Grand classique de la littérature américaine faisant partie des précurseurs dans le genre des true crimes, De sang froid est un choix de premier ordre pour le Challenge Halloween.

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Avec ce livre, Truman Capote  nous plonge dans le quotidien des Clutter, paisible et prospère famille de fermiers. Le père, Herb, est un homme droit et généreux. Son épouse, bien que dépressive, est appréciée de tous. Quant aux deux adolescents, ils justifient autant que leurs parents l'impression qu'on s'en est pris à la dernière famille qui pouvait avoir des ennemis. Le drame plonge la communauté dans une angoisse profonde, d'autant plus que les meurtriers ne sont pas arrêtés avant plusieurs mois.

Du côté de la police, la description de l'enquête, est passionnante. Confrontés à une attente immense de la part de la population et dotés d'un nombre très faible d'indices qui handicape aussi bien l'enquête que le procès, les agents doivent faire preuve d'une rigueur extrême et espérer un peu de chance.

" Pourtant, sur le plan théorique, ceci n’était pas sans failles non plus. Dewey trouvait difficile, par exemple, de comprendre « comment deux individus pouvaient atteindre le même degré de fureur, le genre de fureur de psychopathe qu’il fallait pour commettre un crime semblable. "

Smith-Hickock

Quant aux meurtriers, nous les suivons également dans leur périple, depuis leur entreprise mortelle jusqu'au gibet. Si l'on connaît rapidement le dénouement, les zones d'ombre qui entourent l'affaire suffisent à rendre ces hommes fascinants et inquiétants. Davantage présents que les victimes, le lecteur devient un juré sans doute moins impassible que ceux qui ont condamné Smith et Hickock à mort.

Bien qu'il ne prenne aucunement parti et que cette affaire soit moins intense que ce que j'imaginais (pas de folie meurtrière de la part de la population, pas de vrais rebondissements), cette lecture est aussi addictive que marquante. De sang froid n'est pas un simple récit, c'est aussi un livre qui nous amène à questionner les limites et les aberrations du système judiciaire américain. Smith et Hickock ont-ils eu un jugement équitable ?  La société ne doit-elle pas se montrer exemplaire dans ce genre de cas ? La peine de mort est-elle une violence légitime et acceptable ?
Enfin, et c'est sans doute le point le plus intéressant, l'auteur évoque la prise en compte encore très faible de la psychologie des auteurs de crimes. Pourtant, celui qui a vraisemblablement commis les quatre meurtres, détruit par la pauvreté, l'absence de cadre affectif et ayant un rapport à la réalité complexe, est d'une certaine manière un homme bien plus touchant que son complice. Peut-on ignorer le contexte dans lequel un individu a évolué ? Est-ce une insulte à la mémoire des victimes de considérer qu’un meurtrier ne peut pas être considéré que comme un monstre ?

Folio. 506 pages.
Traduit par Raymond Girard.
1966 pour l'édition originale.

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