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lilly et ses livres
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27 février 2009

Expiation ; Ian McEwan

untitledFolio ; 487 pages.
Traduction de Guillemette Belleteste.
V.O. : Atonement. 2001.

Attention : Le dernier paragraphe de mon billet peut gâcher la surprise.

J'avais déjà lu ce livre il y a deux ans, mais pour une raison quelconque, je n'avais pas écrit de billet dessus. Ce sont des remarques lues sur les blogs ces derniers jours à propos du film (que j'ai bien aimé sans plus, mais qui me semble très inférieur au texte original*) qui m'ont amenée à relire le roman.

Angleterre, 1935. Briony Tallis est une jeune fille de treize ans à l'imagination débordante. C'est l'été, il fait une chaleur étouffante, et la maison est envahie par les cousins des Tallis. Leon, le grand-frère, doit rentrer pour la soirée, accompagné de son ami Paul Marshall. Robbie Turner, le fils de la femme de ménage est là également, tout comme la grande soeur de Briony, Cécilia.
La journée se déroule lentement. Briony est témoin de plusieurs scènes qu'elle ne comprend pas, et que personne ne prend la peine de lui expliquer. Dans la soirée, la jeune fille commet un acte irréparable, et passera sa vie à tenter d'expier ce crime.

Expiation n'est pas un livre qui raconte une tragique histoire d'amour. Ce livre est bien l'histoire d'un gâchis, qui résonne dans chaque phrase, dans chaque thème exploré, mais qui est avant tout celui de Briony Tallis. Peut-être même seulement le sien. 
Il peut sembler naturel que Briony se châtie elle-même, et que les coupables et les innocents considère cela comme un moindre mal, mais elle est la moins responsable de tous. Son imagination est débordante, certes. Mais la critique de Ian McEwan se concentre en fait sur la société anglaise, dont la famille Tallis est un parfait exemple. On s'y attache à ne surtout pas parler des choses qui fâchent ou qui mettent mal à l'aise. Le sexe en est l'une des premières. Un viol est commis, mais on ne met pas de mot sur cet acte. On prend le premier coupable qui se présente, et on étouffe l'affaire. Emily Tallis, l'adulte, la mère, qui pense elle même que Lola est dangereuse, rejette toutes ses suspicions quelques instants plus tard. Alors que Briony est infirmière pendant la Seconde Guerre mondiale, elle est poursuivie par ces protocoles et principes. Donner son prénom à un patient est le pire des crimes, parce qu'il crée une intimité. Dans ce contexte, la réaction de la petite fille paraît naturelle, ceci d'autant plus que Ian McEwan décrit la journée au bout de laquelle tout bascule en multipliant les points de vue, avec une précision extrême, afin d'expliquer comment on a pu en arriver là.   
L'entreprise d'expiation de Briony est incroyablement bien construite. Le pouvoir de la fiction sur la réalité est un thème central du roman. McEwan est lui même très conscient de ses possibilités en tant qu'écrivain. Je me souviens que j'avais eu l'occasion d'admirer cela dans Amsterdam. Cette fois, c'est encore plus évident, car McEwan connaît aussi ses limites, et par conséquent le drame de son héroïne :

" Comment un écrivain peut-il se racheter, alors que, doué du pouvoir absolu de décider de la fin, il est également Dieu ? Il n'a personne, ni entité ni forme supérieure à qui en appeler, avec qui se réconcilier ou qui puisse lui pardonner. Il n'existe rien en dehors de lui. En imagination, il a fixé les limites et les termes. Pas d'expiation pour Dieu ni pour les écrivains, même s'ils sont athées. "

L'auteur m'a bien eue avec ce livre la première fois que je l'ai découvert. Cette fois, connaissant le dénouement, j'ai pu interpréter ce que je lisais avec des yeux nouveaux par rapport à ma première lecture. J'ai vu ce qui m'avait échappé il y a deux ans, occupée que j'étais à savoir si les personnages s'en étaient sortis. Le livre est rempli de références à la fiction, la fameuse bibliothèque, le thème des lettres échangées par Cecilia et Robbie, le titre des parties, qui change brusquement à la fin, tout est très clair. Et ce "reviens" répété sans cesse (ce qui m'exaspère au plus haut point dans le film) par Robbie, dont on ne comprend la signification que dans les dernières pages...

Expiation est un roman extrêmement bien construit et bouleversant. Un chef d'oeuvre comme tous les livres de McEwan que j'ai lus. Il est également plus abordable que d'autres romans de l'auteur pour ceux qui ne le connaissent pas je pense.

* Je trouve particulièrement que les trois Briony font un travail remarquable, avec le peu de place qui leur est accordé.   

Emjy a écrit un billet magnifique sur ce roman. Allie, Fashion et Carolyne Grey ont aussi lu ce livre.

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24 février 2009

Le Général du Roi ; Daphné du Maurier

25183_0_1_Le Livre de Poche ; 435 pages.
Traduction de Henri Thies.
V.O. : The King's General. 1947.

Il y a deux ans, j'étais bien partie pour dévorer l'oeuvre entière de Daphné du Maurier. Mais je suis tombée sur La crique du Français, qui m'a profondément ennuyée (pour ce que j'en ai lu), et je suis passé à autre chose. C'est Vera qui m'a donné l'envie de renouer avec celle qui m'avait tant touchée dans Rebecca et surtout L'auberge de la Jamaïque. Ceci d'autant plus que  pas mal de titres de Daphné du Maurier figurent dans ma PAL, et que contrairement aux apparences, je projette de lire ces livres un jour...

Cornouailles, XVIIe siècle. Honor Harris est encore une jeune fille vivant sous les Stuarts lorsque, le jour de ses dix-huit ans, elle rencontre Richard Grenville, officier du roi, âgé de dix ans de plus qu'elle et dont le caractère est celui d'un homme impitoyable. Ils tombent amoureux, se fiancent, et tout semble prêt pour faire un roman historique comme il y en avait certainement des centaines à l'époque de du Maurier, et comme il y en a toujours des centaines aujourd'hui. Nous sommes dans une province reculée, leur cause est perdue d'avance, les deux amoureux ont des caractères opposés, il y a comme d'habitude une vilaine au nom douteux (Gartred) qui séduit tous les hommes, et l'héroïne est diminuée aux yeux de tous sauf aux yeux de son amant.  Cependant, Daphné du Maurier, que je n'ai jamais vu raconter des histoires à l'eau de rose, annonce très vite la couleur en indiquant au lecteur qu'il ferait mieux d'aller chercher ailleurs s'il souhaite lire un livre larmoyant.

Honor n'est pas du tout le genre de personnage qui laisse au lecteur le temps de s'apitoyer sur son sort. Les quinze années où elle ne voit pas Richard passent en un instant, et quand ils se retrouvent, c'est rarement pour parler d'amour. On est en plein dans la première révolution anglaise, et la Cornouailles, chère à Daphné du Maurier, est dans le camp des Stuarts.  Je connais bien ces derniers, qui m'ont occupée pendant de nombreux mois (ainsi que mon entourage, mais il est inutile de leur rappeler ces heures douloureuses...). Ils n'apparaissent pas vraiment ici, mais j'ai été heureuse de les retrouver, même de loin. On a droit à un bon aperçu des horreurs de la guerre. Menabilly, la propriété du beau-frère d'Honor, est occupée et pillée, les gens sont jetés sur les routes, punis pour leur résistance au Parlement, les hommes partent et ne reviennent pas toujours... Le camp royaliste n'est pas idéalisé. Sir Richard Grenvile est sans doute l'un des personnages les plus machiavéliques que j'ai jamais rencontrés, et sa popularité est loin d'être fameuse. Il est cruel, orgueilleux, et sa rivalité avec d'autres généraux constitue un véritable handicap pour son camp. On l'aime parce qu'on le regarde à travers les yeux d'Honor, mais il n'est pas véritablement différent de sa soeur (l'infâme Gartred dont je parlais plus haut). Cette dernière sert à autre chose qu'à jouer les vipères dans la vie d'Honor, et n'est pas aussi méprisable qu'elle en a l'air.

Ce livre n'est pas parfait, et il s'agit clairement d'un (très bon) roman de genre. Mais Le Général du Roi est assurément une histoire qui se dévore (en une journée en ce qui me concerne), et dont on ressort secoué.

L'avis de Bladelor (qui avait fêté Daphné du Maurier pendant une semaine l'année dernière).   

21 février 2009

Vera ; Elizabeth Von Arnim

untitledSalvy ; 287 pages.
Traduit par Bernard Delvaille. 1921.*

Cet été, une commentatrice de ce blog, en me parlant de Daphné Du Maurier, disait ne pas du tout apprécier sa Rebecca. En revanche, elle me conseillait un ouvrage d'Elizabeth von Arnim, publié bien avant, et dont le postulat de départ ressemble étrangement à celui de Rebecca. Il ne m'en a pas fallu plus pour que je me lance dans une quête effrenée de ce livre (et malheureusement, il semble bien que pour le dénicher, il faille beaucoup de volonté...). Il faut savoir qu'Elizabeth von Arnim était la cousine de la délicieuse Katherine Mansfield, ce qui constituait pour moi une motivation supplémentaire.

Vera débute alors que la jeune Lucy vient de perdre son père. Ils étaient très proches, elle l'avait emmené en Cornouailles afin qu'il se repose et qu'elle prenne soin de lui au mieux, mais maintenant qu'il est mort, elle ne ressent rien. Elle sort se promener, perdue dans ses pensées, et croise sans le voir un homme beaucoup plus âgé qu'elle, en deuil lui aussi, mais qui est frappé par l'expression qu'il lit sur le visage de la jeune fille. Cet homme s'appelle Everard Wemyss, et sa femme vient de mourir dans des circonstances troubles. Des liens se tissent immédiatement entre Lucy et Wemyss. Ce dernier s'occupe d'organiser les funérailles du père de la jeune femme, et que tous les proches du défunt prennent pour un parent de Lucy, ou un ami très proche de ce cher Jim qui vient de mourir. Même la tante de Lucy, l'affectueuse Miss Entwhistle, n'envisage pas un seul instant que cet inconnu puisse être un nouveau venu dans la vie de sa nièce.
Lucy et Everard tombent naturellement amoureux, et ce dernier, impatient d'avoir sa "petite fille" pour lui seul, décide de ne pas respecter l'obligation de deuil d'un an avant de se remarier. Ils choquent les proches de la jeune fille, qui ont tous eu connaissance de la mort de Vera, la première épouse de Wemyss dans les journaux. Toutefois, ils sont déterminés à ce que rien ne viennent entraver leurs plans.

Il est certain que l'on ne peut s'empêcher de penser à Rebecca en lisant la première partie du roman. J'ai sursauté en lisant les propos de Wemyss au sujet d'une servante de Vera qu'il n'appréciait pas. Difficile de ne pas croire que l'on va se retrouver face à une nouvelle Mrs Danvers. Après le mariage, alors que le couple se rend aux Saules, la demeure dans laquelle Vera est morte, le fantôme de cette dernière semble hanter les pièces. 
Mais en fait, on se trompe du tout au tout. Dans ce livre, Elizabeth von Arnim se joue de son lecteur, et n'a d'autre but que de lui montrer que l'amour aveugle, et que ce que l'on prend pour une affection touchante n'est parfois autre chose que de la tyrannie. Si vous voulez lire ce livre, je pense que vous ne devez pas lire ce qui suit.
En fait, Wemyss, qui semble impatient parce qu'amoureux fou de Lucy, se transforme très vite en personnage détestable. Certaines de ses réactions lors des funérailles du père de Lucy, puis lors du séjour de cette dernière à Londres, que je prenait pour des réactions raisonnables, et comme une volonté d'indépendance vis à vis des conventions, n'étaient en fait que le reflet du caractère odieux de Wemyss. Cet homme est capricieux, tyrannique, manipulateur et égoïste comme peu de gens. Son comportement à l'égard de Lucy se révèle de plus en plus insupportable. Il ne pense qu'à son bonheur, ne désire voir que ce qu'il a envie de voir, et refuse d'entendre les plaintes pourtant bien compréhensibles de sa jeune épouse. Comme Lucy, on lui pardonne presque à chaque fois. Après tout, Wemyss est bel et bien amoureux de la jeune fille qu'il croit avoir entre les doigts. En fait, il m'a fallu attendre que Miss Entwhistle, celle que l'on prend au départ pour la vieille bique rabat-joie (ces pantalons gris !), dise ses quatre vérités à Wemyss, pour que je saisisse que cet homme ne peut être que détestable, et qu'il n'est d'ailleurs pas loin d'être un meurtrier du fait de sa négligence. Il sait tellement se faire plaindre !
Elizabeth von Arnim est terrible, puisqu'elle signifie en fait au lecteur que Lucy ne s'en sortira sans doute pas de sitôt. Miss Entwhistle, jetée dehors pas Wemyss, ne pourra pas lui ouvrir les yeux comme elle l'a fait pour le lecteur. La dernière phrase du livre m'a glacé le sang. Ces appellations que Wemyss donne à Lucy tout au long du livre, et que je trouvais déjà malsaines et hypocrites jusque là, prennent une autre dimension qui n'est pas pour réjouir le lecteur.

Un roman mené d'une main de maître donc, absolument glaçant. Je relirai sans aucun Elizabeth von Arnim. 

*Impossible de trouver la couverture de mon édition sur internet, mais la traduction est la même.

17 février 2009

La cloche de détresse ; Sylvia Plath

resize_4_Gallimard ; 270 pages.
Traduction de Michel Persitz.
V.O. : The Bell Jar. 1963.

« Un mauvais rêve.

Pour celui qui se trouve sous la cloche de verre, vide et figé comme un bébé mort, le monde lui-même n’est qu’un mauvais rêve.

Un mauvais rêve. »

Je ne sais pas vraiment comment aborder ce roman. L’histoire racontée par La cloche de détresse est  tellement vraie que j’ai même du mal à parler de « roman ». Après tout, les critiques s’accordent à dire que l’auteur y a mis énormément d’elle-même. Un mois seulement après la publication du livre, elle se donnait la mort. Je crois qu’on peut aller encore plus loin. Dans ce livre, Sylvia Plath a mis énormément de nous tous.

Erzébeth disait de ce livre qu’il l’avait blessée. Je suis dans la même situation. Je n’ai jamais été dépressive, je n’en suis jamais arrivée aux mêmes extrémités que l’héroïne, mais je pourrais être elle. Ce livre nous fait réaliser à quel point on est vulnérable, à quel point on marche sur des œufs sans même le réaliser. Esther se sent nulle, qui n’en a jamais fait autant ? Il ne se passe rien de particulier, et l’on comprend difficilement comment la situation d’Esther, qui semble pourtant assez commune, peut dégénérer comme cela. Je trouve que c’est effrayant. Est-ce que tout dérape quand Esther réalise à New York que l’on est qui l’on est où que l’on soit ?

« Des filles comme ça me rendent malade. Je suis tellement jalouse que j’en perds la parole. Pendant dix-neuf ans je n’ai pas mis les pieds hors de la Nouvelle-Angleterre si ce n’est pour une ballade à New York. C’était ma première grande chance, mais j’étais là, vautrée dans mon fauteuil, la laissant filer comme de l’eau entre mes doigts. »

Etre un individu qui aime le calme et qu’il faut traîner ou piéger pour l’attirer dans les endroits branchés n’est pas toujours facile à vivre, j’en sais quelque chose. Et partir à l’aventure, changer de décor, ne modifie rien. Les jeunes filles lauréates du concours sont chouchoutées, on leur ouvre des portes, mais contrairement aux autres, Esther ne voit là que des futilités. Sa dernière soirée à New York, elle la passe à offrir au vent ces vêtements qui ne sont pas elle.

Elle pense là où les autres prennent ce qui vient, et voilà son drame. Elle cherche à définir ce qu’est le bonheur, et elle réalise que ses souhaits sont en totale contradiction :

« Névrosée ! ah ! ah ! ah ! … J’ai laissé échapper un rire plein de dédain : ‘Si c’est être névrosée que de vouloir au même moment deux choses qui s’excluent mutuellement, alors je suis névrosée jusqu’à l’os. Je naviguerai toute ma vie entre deux choses qui s’excluent mutuellement… »

Esther est un être à part, hors de son époque et de son sexe. J’ai lu que ce livre était considéré comme féministe. Je rejette ce terme pour parler de ce livre, parce qu’il est réducteur, et pourrait donner lieu à une interprétation stupide du parcours d’Esther. Elle veut vivre et n’y parvient pas, elle veut avoir le droit de choisir même si elle ne sait pas le faire. Elle refuse la maternité, le rôle de la gentille épouse, mais elle ne pense qu’à son propre bien être.

« C’était une des raisons pour lesquelles je ne voulait pas me marier. La dernière chose que je souhaitais, c’était bien la sécurité infinie et être l’endroit d’où part la flèche… Je voulais des changements, du nouveau, je voulais tirer moi-même dans toutes les directions, comme les fusées du 4 Juillet. »

Un tel être ne peut qu’étouffer quand il est confronté à une existence morose. Il erre de déception en déception, jusqu’à ce que qu’il en arrive à un point où il ne peut même plus être déçu. Car il n’a plus la moindre chose à attendre. Quand Esther rentre de New York, elle a une réponse négative à sa demande de cours d’été. Puis, plus rien. Triomphe alors l’impression d’être totalement inutile, qui est née à New York :

« J’ai commencé par additionner les choses que je ne savais pas faire. »

Cette phrase semble banale, mais lorsque l’on commence à s’engager sur cette voie, il est impossible que tout s’achève bien. Surtout quand on est Esther, et que l’on pense sérieusement ce que l’on fait :

« - Comme les cadavres que tu dissèques ! Comme les gens que tu te figures guérir ! Ils sont aussi poussière qu’il est possible d’être poussière. Je suis persuadée qu’un bon poème dure plus longtemps qu’une centaine de tes clients mis bout à bout…

Et bien sûr, Buddy ne trouvait rien à répondre à ça, parce que c’était l’absolue vérité. Les gens ne sont faits avec rien de plus que de la poussière, je ne voyais pas du tout pourquoi soigner ces tas de poussière vaudrait mieux qu’écrire des poèmes dont les gens se souviendraient, qu’ils se réciteraient quand ils seraient tristes, malades ou insomniaques… »

Esther sombre, tombe tellement bas qu’elle ne peut plus descendre encore. On l’emmène, on la soigne avec les moyens du bord (les électrochocs, un peu comme si elle était une criminelle, et c’est d’ailleurs ce qu’elle est pour les autres, sa mère en tête). 

On la recolle, on la rafistole, on l’aide à se persuader que tout va bien. J’ai peur que ce ne soit pas le cas :

« Il y aurait un trou noir de six pieds de profondeur, creusé dans la terre dure. Une ombre en épouserait une autre, le sol étrangement jaune de notre localité refermerait la blessure ouverte dans sa blancheur. Une autre chute de neige effacerait toutes les traces récentes sur la tombe de Joan.

J’ai respiré un grand coup, et j’ai écouté le vieux battement de mon cœur.

Je vis, je vis, je vis. »

 

La cloche de détresse n’est pas un livre qui vous fait sombrer de bout en bout. C’est un livre qui ne plonge dans aucun extrême. Je ne sais pas comment l’exprimer correctement, mais le lecteur ne passe pas un sale quart d’heure. Il trouve des refuges qui ne sont d’aucun secours à Esther, mais qui permettent au lecteur de l’accompagner, et de ressentir les choses peu à peu. On en ressort sonné, nauséeux, parce que l’on n’a rien vu venir, et c’est ce qui fait les grands livres.

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Sylvia Plath et son mari, Ted Hughes (1956)

Un immense merci à Erzébeth pour cette découverte (si tu arrêtes tes bêtises avant ce soir, je ne te dénonce pas). Fashion et Levraoueg, j’espère que vous tremblez maintenant…

Anne aussi a aimé.

16 février 2009

Le cher ange ; Nancy Mitford

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La Découverte ; 276 pages.
Traduction de Olivier Daria.
V.O. : The Blessing. 1951.

Je vous en prie, dîtes-moi que vous aussi vous trouvez la couverture de ce livre affreuse ! On dirait celle d'un mauvais roman à l'eau de rose, et lorsqu'on ne connaît pas la signification du titre, ni l'auteur, je comprends que l'on parte en courant...
De Nancy Mitford, j'avais lu La poursuite de l'amour, un livre très sympathique, mais qui ne m'avait pas non plus entièrement conquise. Le cher ange s'est chargé de le faire, ce livre est absolument exquis !

Grace, une jeune et riche anglaise, rencontre Charles-Edouard de Valhuibert, de passage à Londres pendant la Deuxième Guerre mondiale. Il est Français, de haute lignée, passionné d'art, et coureur de jupons insouciant. Bien que fiancée à un autre homme, Grace accepte d'épouser Charles-Edouard, dont elle est tombée éperdument amoureuse. Après une courte et singulière lune de miel, Charles-Edouard part sur le front, où il demeure sept ans.

« Quand, durant les années solitaires à venir, Grace tentait de se remémorer ces dix brèves journées, la même image s’offrait toujours à son esprit : Charles-Edouard déplaçant les meubles. »

A son retour, il retrouve son épouse, ainsi qu'un petit garçon, Sigismond. Le couple se rend immédiatement en France, où les habitudes de vie différentes des deux époux, qui étaient jusque là uniquement un sujet de plaisanterie, deviennent un sujet de discorde.  

C’est alors que le rôle de Sigismond prend toute son importance. Le « cher ange », comme le baptisent volontiers sa mère et sa Nanny, délaissé par son père lorsque ses parents étaient heureux, devient le centre de toutes les attentions, et n’est pas près à renoncer à ce nouveau statut.

Ayant moi-même vécu à l’étranger, je sais combien passer une simple frontière peut déboussoler un individu, même lorsque celui-ci est plein de bonne volonté. Les personnages de ce roman sont tous ou presque fort sympathiques, curieux, mais si pleins de préjugés, envers les autres nationalités, envers l’autre sexe, que cela donne lieu à des situations loufoques, et parfois douloureuses. L’Europe se relève difficilement des ravages occasionnés par la Seconde Guerre mondiale, et malgré l’entente cordiale, la "vieille petite Europe" et les "grands Etats-Unis d'Amérique" ne se comprennent pas davantage que les Anglais et les Français. De toute façon, même lorsqu’ils ont des points communs, ils sont incapables de les voir. 

Heureusement, l’ironie de Nancy Mitford bat son plein dans ce roman. J’avais souri dans La poursuite de l’amour, Le cher ange se sert admirablement de l’humour pour calmer les esprits, relativiser, envisager tous les points de vue, et finalement accepter l’autre et arrêter de ne percevoir la situation qu’à travers ses propres principes. Ce Charles-Edouard ! Il ressemble d’abord à un horrible type, mais comme on comprend Grace à la fin ! J’aime sa façon de voir les choses, et même si je partage plutôt les conceptions de Grace, la manière dont il envisage parfois le mariage est tellement naïve qu’on la lui envie. Lorsque sa femme lui avoue qu’elle a pensé épouser deux autres hommes,  voilà ce qu’il lui répond :

« Extraordinaire ! Avouez que vous ne vous seriez jamais amusée autant qu’avec moi ?
- L’amusement n’est pas le but du mariage, fit Grace, très digne.
- Vous en êtes sûre ? »


Sans commentaire. Il n’est pas tout le temps comme cela non plus, il sait aussi agir en adulte, et pourquoi il a épousé Grace (non, rien à voir avec l’argent, même si, comme tout le monde le sait, les Français, qu’ils soient richissimes ou non, ne négligent jamais la perspective d’en avoir encore plus…).

Le couple formé par Grace et Charles-Edouard est victime des manigances de Sigismond, mais ce dernier sait aussi être plus attendrissant aux yeux du lecteur, lorsqu’il entreprend de se faire gâter également par ceux qui aspirent à devenir ses beaux-parents. L’une des maîtresses de Charles-Edouard, afin de conquérir le garçon, organise un bal où les enfants sont conviés. C’est une première dans la bonne société parisienne, et une véritable catastrophe. Les adultes s’arrachent les enfants, relégués à la campagne d’ordinaire, afin d’être admis au bal, deux mères incapables de reconnaître leur bébé à la fin de la soirée tirent au sort l’enfant qu’elles vont remporter, et le petit Sigismond s’endort, tandis que son père est parti s’amuser avec une honnête épouse... 

Un roman délicieux, idéal en cas de petite baisse de morale ou simplement pour se divertir.

Emjy aussi a adoré.

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14 février 2009

Swap Saint Valentin

Hier matin, j'étais au bord du désespoir, mon colis swap n'était toujours pas arrivé, et le facteur ne semblait pas vouloir se montrer. Vers midi, ma mère est venue vers moi en me disant "Tiens, il y a un avis de passage". J'ai foncé à la Poste : fermée... Après avoir tourné en rond pendant une heure de plus, j'y suis retournée, et le postier m'a apporté ce ravissant paquet...

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Voilà ce qu'il contenait, plein de paquets roses avec des mots dessus :

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Des livres bien sûr : un recueil des plus belles déclarations d'amour dans la littérature, Les liaisons dangereuses de Laclos que je veux lire depuis longtemps, et La forêt d'Iscambe, que je ne connaissais pas du tout.

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Le DVD du Patient anglais, que je voulais justement voir :

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Deux tasses avec leur jolies cuillères, une boîtes à mots doux, un ravissant carnet et un stylo rose :

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Et pour finir, un sachet du Thé des Amants, du chocolat caramélisé et de délicieux biscuits au gingembre faits maison.

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Merci infiniment à Chiffonnette pour ce magnifique colis !! Et à Fashion et Stéphanie pour toute l'organisation (je réalise que j'ai oublié de vous prévenir de l'arrivée de mon paquet...) !

Pour ma part, j'ai envoyé un paquet à ma copine Lou.

13 février 2009

La maison des célibataires ; Jorn Riel

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Lou, qui n'a pas vraiment apprécié ce livre, m'avait cependant donné envie de le lire. Elle me l'a très gentiment offert pour Noël, et je me suis empressée de me plonger dans ce livre très court. Ce n'est pas peu dire que je n'y connais rien à la littérature scandinave, alors je me suis dit que c'était l'occasion de l'explorer un peu.

Cinq célibataires vivent dans une maison abandonnée, dans un petit port. Kernatoq, le seul qui travaille et subvient aux besoins de la maisonnée, décide un jour d'assurer son avenir et celui de ses compagnons en convolant. Mais voilà, il a jeté son dévolu sur Bandita, une femme terrifiante vivant dans un lieu reculé et qui, dit-on, a battu à mort son premier mari. Bandita semble ravie de voir débarquer un nouveau prétendant, mais les autres ne parviennent pas à accepter cette décision de leur ami, et décident de tout mettre en oeuvre afin que le mariage n'ait pas lieu.

Voilà un texte que j'ai lu il y a déjà plusieurs semaines, et dont il ne me reste plus grand chose. J'ai certainement été davantage que Lou sensible à l'humour contenue dans cette nouvelle, et j'ai trouvé qu'elle se lisait plutôt bien, mais il est certain que je n'en garderai pas un souvenir impérissable.
Je ne suis pas une grande lectrice de nouvelles, et plus le temps passe, plus j'ai du mal à les apprécier. Il est rare que je parvienne à me plonger dans une histoire de quelques dizaines de pages seulement. Certains auteurs parviennent à le faire, mais ici, les personnages demeurent des étrangers. On apprécie le spectacle de Bandita et de Kernatoq, le côté loufoque de tous les personnages, mais on le fait avec recul, et ce n'est pas cela qui me transporte dans un livre.
Cela dit, je laisse la porte ouverte à d'autres textes de l'auteur, si je croise un jour quelque chose de plus long...   

10/18 ; 76 pages.
Traduction de Susanne Jull et Bernard St Bonnet.
V.O. : Ungkarlehuset. 1979.

12 février 2009

La pomme rouge ; Francis Garnung

41FKDKW256LPhébus ; 155 pages.
1956.

Avant la Lolita de Nabokov, il y a eu La Pomme rouge de Francis Garnung. Je me suis toujours demandé comment un roman mettant en scène un amour entre un homme et une enfant pouvait ne pas sembler malsain. Cette interrogation m'a poursuivie au cours de ma lecture, et je ne pense pas pouvoir totalement la dépasser, même maintenant, mais ce livre est paradoxalement très délicat. Ne vous attendez pas à lire un vrai billet sur ce livre. J'ai su l'aimer, mais je ne crois pas être réellement capable d'en parler. Il s'agit d'un roman dont le contenu me dépasse de beaucoup.

Quelques mots sur l'histoire pour commencer : François est un homme de trente ans, qui tombe amoureux de sa voisine, Guillemette, douze ans. Il lui écrit des lettres dont on ne voit jamais les réponses, et qui, "à peine lues", "doivent disparaître"

Ce livre est un magnifique texte sur l'enfance et sur ce que signifie grandir. Le style est d'une incroyable douceur. C'est presque un conte que l'on croit entendre. Le narrateur n'est jamais un ami. Son affection pour Guillemette répulse.

" J'ai découvert la légende de sainte Guillemette, et je vous la confie pour votre édification personnelle. Ça ressemble au Petit Chaperon rouge, direz-vous ? Parce qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil, et les loups guettent toujours les petites filles."   

Peut-on vraiment rester accroché à son enfance comme François le fait ? La première lettre qu'il envoie à Guillemette est celle d'un gosse. Elle l'attire, elle le vexe, il lui dit qu'elle est repoussante. Six fois à la suite, il emploie le mot "laide" pour la qualifier. Avant de la tutoyer, de l'appeler par des mots d'amour. Il est envieux de sa jeunesse. La mère de Guillemette tente de le séduire, mais il n'a d'yeux que pour l'enfant, en qui il croit retrouver la fillette qu'il a aimée quand il était petit garçon, et qu'il n'a jamais oubliée.Elle est odieuse cette mère d'ailleurs, prête à encourager le loup qui frappe à sa porte.
Tout va de travers dans ce livre. Les adultes sont à la recherche de leur jeunesse qui s'envole, et l'enfant appelle l'âge adulte adulte, porte les sous-vêtements de sa mère en espérant être ainsi plus désirable aux yeux de François.

" Quand toi tu aimes à te déguiser en femme (ne le nie pas, je t'ai vue de ma fenêtre...), ta mère se déguise en minette, avec socquettes et minijupe. A quand des couettes avec des rubans roses ? "

Mais voilà, François et la mère de Guillemette ne peuvent rien contre les années. Là où François se contente de s'interroger,

"Suis-je arrivé trop tôt dans ta vie ? Es-tu venue trop tard dans la mienne ? "

Guillemette parvient à percevoir le loup qui l'habite et qu'il ne peut dissimuler. La réponse qu'elle apporte est évidente aux yeux de tous, sauf aux yeux de ceux qui aimeraient croire en cette relation, qui leur donne le sentiment de retrouver ce qu'ils ont perdu. On les blâme ces deux êtres, ce sont eux les vrais adultes après tout, et Guillemette, bien que provocante, n'agit pas moins en enfant, quelque soit le rôle et la responsabilité que François tente de lui attribuer. Il sait se déguiser en agneau, en victime presque, mais il ne trompe personne, et surtout pas lui même. Il le dit lui même, "toute grande personne ternit tout ce qu'elle touche si elle ne redevient pas enfant."   

Lily a écrit un merveilleux billet sur ce livre.   

10 février 2009

Les vies d'Emily Pearl ; Cécile Ladjali

resize_3_Actes Sud ; 191 pages.
2008.

Il y a des livres qui vous semblent plein d'espoir, qu'il vous faut absolument, mais que vous méprisez quand même un peu, puisque leurs ambitions ont l'air ridiculement grandes. Quand je lis des romans dits "d'inspiration victorienne", il s'agit essentiellement pour moi de trouver des clins d'oeil aux oeuvres des maîtres de l'époque. Cette fois, ce but n'a pas été atteint, mais c'est parce que Cécile Ladjali a accompli quelque chose de beaucoup plus grand.   

Emily Pearl est une pauvre fille de la campagne à l'extrême fin du XIXe siècle anglais. Dans un cahier, elle inscrit sa vie, vécue ou rêvée, peu importe. Elle parle des lettres de sa soeur Virginia, qui a fuit une existence misérable pour une autre existence misérable, mais choisie celle-là, de son rôle de perceptrice auprès de Terrence, le fils malade de Lord Auskin, de sa relation avec ce dernier, de la vie à Green Worps, d'elle même en fait.

Moi qui aime si peu les auteurs français contemporains, j'ai complètement succombé à la poésie, à la fantaisie et à la tristesse de ce petit livre. A côté de Rachel, Lucy, Kath ou Angel, se trouvera Emily Pearl désormais. Je pourrais vous dire qu'on perçoit les ombres de Jane Eyre et Virginia Woolf en lisant ce livre, mais cela n'a aucune importance en fin de compte. J'ai été totalement éblouie par l'héroïne de Cécile Ladjali. Elle est bourrée de défauts, et certaines de ses actions peuvent rebuter nombre de personnes, mais j'ai toujours eu un faible pour les héroïnes à l'imagination débordante, qui cherchent dans l'écriture un sens à leur vie. Elles sont finalement avant tout des prisonnières, même lorsque, comme Emily, elles ont conscience des conséquences de leurs actes :

" Virginia et son époux luttent pour la vérité et la liberté. Alors que moi, je fais enfermer les innocentes. Qu'est-ce qu'il y a donc de pourri en moi ? Qu'est-ce qui me fait, dans le banal petit jour du matin, haïr à ce point l'humanité ? "

En fait, paradoxalement, Emily est la seule à percevoir la réalité des choses. Elle veut être libre, être heureuse, mais elle a quand même conscience de la médiocrité de son existence et de celle des autres, quand ces derniers se voilent la face, par refus du chagrin ou par vanité :

" J'enviai alors cet homme et sa capacité à sélectionner les détails de la vie susceptibles de ne lui apporter que du bonheur et à jeter dans les douves de l'amnésie ceux qui auraient pu le conduire au désespoir. Je n'avais pas cette force. "

"Ce vieil homme connaît aujourd'hui ce qu'il n'aurait jamais pensé pouvoir vivre : une apothéose sociale ! Il ne réalise pas que la moitié de l'assistance est composée des plus grands marginaux du pays, de toute la fratrie artiste et homosexuelle du Nord de l'Angleterre. Non, cela il ne le voit pas. Il ne retient de cette faune bizarre que ce qu'en retiendrait un parvenu : le velours des redingotes, la cherté des toilettes, la lourdeur des parfums coûteux qui empoisonnent l'air, le fait que trois prêtres, dix enfants de choeur et cinq choristes soient convoqués pour le mariage de sa cadette. Je suis certaine aussi qu'il n'a pas manqué de considérer, à l'entrée de la chapelle, les trente superbes bêtes, harnachées à de profondes calèches couvertes d'armoiries ducales. Mon père n'a d'yeux que pour ces spectacles. En revanche, il reste aveugle à celui de ma détresse, il ne devine même pas le ventre de Pitch qui déborde de son habit, il ne voit pas non plus sa femme, secouée par les sanglots de bonheur, et que compresse une abominable robe d'apparat vert canard. "

Emily sait aussi aimer, même si elle se répète sans cesse le contraire. Fuir ses sentiments, ce n'est pas ne pas les éprouver. Terrence, ce gamin difforme, encore un genre de personnages que j'aime inévitablement, Emily est prête à tout pour le soulager, et elle le fera.

On ne sait pas ce qui est exact, qui existe vraiment, ce qui est écrit, ce qui est réellement dit. Cécile Ladjali ne signale pas les dialogues par une ponctuation spécifique. Ce livre est un tout, parfaitement harmonieux, une longue réflexion sur ce que l'on fait de sa vie, sur ce que l'on n'ose pas et sur les peines inévitables auxquelles il faut faire face. C'est enchanteur malgré la tristesse qui se dégage de l'histoire. Un bijou !

Malice et Lou ont adoré.
Emjy est plus mitigée. 

8 février 2009

La nuit des temps ; René Barjavel

resize_5_Pocket ; 381 pages.
1968.

Je m'épate vraiment depuis le début de l'année. On est début février, et j'ai déjà lu six livres sur les trente que j'avais pré-sélectionnés ! J'ai aussi réalisé que j'avais réussi un challenge pour la première fois de ma vie, celui du 1% littéraire. Bref, tout ce blabla a surtout pour but de me motiver, donc je m'arrête.
En ce qui concerne La nuit des temps, j'en ai toujours ou presque entendu parler comme d'un chef d'oeuvre avec une superbe histoire d'amour, et c'est donc avec beaucoup d'enthousiasme que je l'ai ouvert.

Une mission française au Pôle Sud découvre l'existence d'une civilisation perdue depuis neuf cent mille ans. Nous sommes en pleine Guerre Froide, et les grandes puissances vont toutes s'allier, à l'aide de la Traductrice, afin de découvrir ce que renferme une sphère qui témoigne d'une civilisation que les hommes actuels n'avaient jamais soupçonnée.
A l'intérieur, deux individus endormis sont découverts. Les scientifiques présents sur la base vont alors tenter de les réveiller.

La nuit des temps n'est pas un livre abominable. J'ai beaucoup aimé le début de l'histoire, ainsi que certains passages. Il y a beaucoup de références dans ce livre, et il s'agit d'un aspect que j'apprécie de trouver dans un livre. J'ai aussi aimé la fin. Je l'ai vue arriver à des kilomètres, mais elle contient plus d'action que dans les trois cents pages précédentes, et il s'agit des seules pages où le romantisme de l'histoire m'a fait de l'effet. Peut-être garderais-je d'ailleurs un bon souvenir de La nuit des temps grâce à ces cinquante dernières pages.
Sinon, j'avoue avoir trouvé le temps long. J'ai très été vite rebutée par le style de Barjavel. Quelques formules m'ont vraiment surprises. Parler de "raison raisonnable" me fait le même effet que lorsque j'entends "orienté à l'ouest". Il n'y a par ailleurs pas seulement ce genre de formules maladroites dans ce livre. Les rares effets de style tentés tombent à plat. Quant aux scènes romantiques, Lou en parle bien mieux que je ne saurais le faire, mais je les ai trouvées consternantes (et je suis une fille qui vénère La belle au bois dormant de Disney). L'histoire d'amour de Païkan et Elea m'a fait bailler plus d'une fois, je l'ai trouvée exagérée, dégoulinante, et surtout insuffisante à soutenir l'intrigue. A aucun moment je ne suis parvenue à me sentir 900 000 ans en arrière, ou dans un monde totalement différent du nôtre.
Je n'ai pas non plus reconnu le monde actuel. Le roman date de 1968, et donc de la Guerre Froide, et j'ai l'impression que Barjavel l'a rendu trop caractéristique de cette période pour lui permettre de bien vieillir. Il écrit comme si tout ce dont il parle devait être une évidence pour le lecteur, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. Les parallèles qu'il fait entre passé et présent sont datés. Il était souvent nécessaire que je me rappelle le contexte dans lequel Barjavel avait écrit.

Je ne sais pas comment formuler exactement mon ressenti. Cette lecture n'a pas été horrible, j'ai réussi à me raccrocher à quelques idées, à quelques passages, à quelques personnages aussi. Mais La nuit des temps n'a pas pour moi la carrure d'un chef d'oeuvre, juste celle d'une lecture que l'on fait par curiosité, ou d'un livre pour adolescents (j'aurais certainement été comblée il y a quelques années).

Les avis de Majanissa, Carolyn Grey et Lou.   

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