Washington Square - Henry James
" C'était trop grave ; toute ma vie en a été bouleversée. "
Médecin réputé, Austin Sloper n'a cependant pas pu empêcher le décès de son fils ni la perte de sa brillante épouse, dont la mort en couches l'a laissé seul avec une fille médiocre, Catherine. En grandissant, cette dernière confirme sa faiblesse d'esprit et de caractère. Lorsque Morris Townsend, un jeune homme ayant dilapidé son peu de fortune, commence à courtiser la jeune fille, cette dernière tombe sous son charme, encouragée par sa tante. Le Docteur Sloper ne partage pas l'opinion des deux femmes et est bien décidé à empêcher le mariage, quitte à léser cruellement Catherine.
Voilà un roman que j'ai dévoré avec une avidité rare, profitant de chaque minute disponible pour le retrouver. Henry James s'y montre d'une ironie qui rappelle une certaine Jane Austen, même si l'héroïne ne bénéficie pas de la présence opportune d'un prétendant mieux ajusté. C'est donc le cynisme habituel de James qui l'emporte, pour mon plus grand plaisir, je dois le reconnaître, tant la psychologie des personnages est finement exposée.
On pourrait craindre, en lisant la trop bavarde quatrième de couverture, qu'il ne s'agit que d'un conte cruel, mais aussi mince que soit l'intrigue a priori, Henry James nous offre une étude de ses quatre personnages principaux si complexe qu'il est bien difficile de déterminer avec certitude qui sont les gagnants et les perdants, les malins et les imbéciles dans ce livre. Plus qu'une histoire d'amour ratée entre un probable coureur de dot et une jeune fille naïve, Washington square est aussi le portrait d'un homme, obtus et égoïste (sûrement en partie inspiré par le frère de l'auteur), d'une veuve idéaliste espérant pimenter sa terne existence et d'une jeune fille prématurément jugée par tous les autres. Trop occupés par leur propre existence, les trois individus pressant Catherine de se soumettre à leur volonté ne réalisent à aucun moment ce qui se joue réellement devant leurs yeux.
Comme toujours chez James, la fin est aussi frustrante que savoureuse.
Une merveille.
10/18. 283 pages.
Traduit par Claude Bonnafont.
1880 pour l'édition originale.
Les Bostoniennes - Henry James
"Nous connaissons tous, hommes et femmes, ces heures de clairvoyance rétrospective, au moins une fois dans notre vie, quand nous regardons le passé à la clarté du présent, et distinguons les effets et les causes aussi facilement que si tout était indiqué par des flèches qui ne se fussent jamais trouvées là auparavant. Le chemin parcouru jusque-là nous apparaît dessiné et raconté en entier, avec ses faux pas, ses repérages erronés, et toute sa géographie égocentrique et trompeuse."
Boston, années 1880. Ruiné par la Guerre de Sécession, Basil Ransom se rend dans le nord afin d'y exercer sa profession d'avocat. De passage à Boston, il en profite pour répondre à l'invitation d'une lointaine cousine, Miss Chancellor. Si la rencontre entre ces deux individus que tout oppose est un désastre, ils font la connaissance au cours d'une soirée consacrée aux droits des femmes de Verena Tarrant, la fille d'un mesmérien, dotée d'un talent oratoire peu commun. Dès lors, ils ne cesseront de se la disputer.
J'avais de fortes appréhensions en ouvrant ce roman, dont le propos est clairement sceptique vis-à-vis des mouvements féministes américains qu'a pu observer Henry James au début des années 1980. Les cent premières pages sont féroces, établissant en plus un parallèle entre le combat pour les droits des femmes et le mesmérisme.
Pourtant, même si je ne trouve pas que ce livre atteigne la perfection de Portrait de femme, je ne peux que reconnaître qu'il s'agit d'un roman écrit par un immense auteur. Tout d'abord, le style de James, bien qu'exigeant de la concentration, est parmi les plus remarquables que je connaisse, à la fois fin, précis et drôle.
Ensuite, là où de nombreux auteurs moins talentueux se seraient laissé déborder par leur sujet et n'auraient été capables de produire qu'un roman à gros sabots défendant leurs théories, Henry James nous montre dans ce livre toute la complexité de la psychologie humaine. Convaincu que les êtres humains ne cessent de se rater et de se méprendre, alliant dialogues de sourds et (auto)persuasion, il s'agit moins de savoir si les féministes sont dans le tort que de montrer la fluctuance des individus et les rapports de force entre eux.
Il n'y a pas de personnage particulièrement sympathique (excepté Miss Birdseye peut-être, cette vieille féministe sur le déclin qui séduit même Basil Ransom), mais il n'y a pas non plus d'individu entièrement en tort dans cette histoire. Olive Chancellor n'agit et ne pense pas uniquement en tant que féministe enragée. A l'inverse, Basil Ransom n'est pas épargné en matière de ridicule, alternant entre son code de galanterie qui le condamne à des situations grotesques et des discours dignes d'un certain Eric Z. (qui n'a décidément rien inventé).
Alors, bien sûr, on se doute que la sympathie de l'auteur n'est pas dirigée vers ce qu'il juge comme des artifices de la modernité. Il tire à boulets rouges sur les médias (autre domaine où il est particulièrement clairvoyant), le charlatanisme. Les réunions organisées par Olive et ses comparses sont tournées en ridicule. Cependant, Henry James n'est pas un caricaturiste. C'est un peintre qui n'oublie aucune nuance et nous oblige à tourner et retourner autour de ses personnages pour nous faire comprendre que nous ne les cernerons jamais. Et, comme souvent, il n'oublie pas de faire durer le suspense jusque dans les dernières phrases.
Folio. 696 pages.
Traduit par Jeanne Collin-Lemercier.
1886 pour l'édition originale.
Portrait de femme - Henry James
" - Je l'ai trouvée par un jour pluvieux dans une vieille maison d'Albany, assise dans une pièce lugubre, lisant un ouvrage indigeste et s'ennuyant à périr. Elle ignorait qu'elle s'ennuyait mais je ne lui ai laissé aucun doute sur ce point et elle m'a paru très reconnaissante de ce service. "
Lorsque Mrs Touchett, épouse d'un respectable banquier américain établi en Angleterre, revient chez son époux avec sa nièce, elle est loin de se douter des conséquences de sa décision. Isabel Archer, jeune américaine peu fortunée mais avide de connaissances et d'expériences, va charmer l'Europe, à commencer par son oncle et son cousin, le chétif Ralph.
Son tempérament orgueilleux et quelques mauvaises rencontres vont cependant bien vite lui jouer des tours.
C'est avec beaucoup d'appréhensions que j'ai ouvert ce livre. Henry James est un auteur dont j'ai adoré certains titres, essentiellement des nouvelles, mais qui m'a également procuré d'inoubliables moments d'ennuis avec ses romans.
La malédiction semble rompue. Portrait de femme est peut-être mon plus gros coup de coeur de l'année (j'hésite encore avec Les Raisins de la colère). Je ne me rappelle plus à quand remonte la dernière fois où j'ai, comme ici, repoussé l'heure de mon coucher de façon très imprudente pour avoir le plaisir de lire encore un chapitre, puis un autre. J'ai atteint la dernière page avec un mélange d'impatience et d'appréhension tant j'étais avide de connaître le dénouement tout en souhaitant que cette histoire s'étire encore et encore.
L'intrigue m'a captivée de bout en bout. J'ai autant savouré l'aventure anglaise d'Isabelle Archer que son arrivée en Italie. J'ai éprouvé toute l'affection du monde pour le vieux Mr Touchett et son fils, bien que ce dernier ne soit pas exempt de défauts. J'ai admiré avec un peu de mépris Henrietta Stackpole, Mrs Touchett et même la comtesse Gemini. J'ai évidemment détesté Mrs Merle et Mr Osmond.
James étudie avec une finesse absolue la psychologie de ses personnages. Certes, il se moque souvent d'eux, critique leurs travers et ceux de leur époque : le radicalisme hypocrite de Warburton, l'indépendance et la frivolité de la journaliste américaine, l'attitude encourageante d'Osmond face aux idées de son épouse, à condition que ce soit aussi les siennes... Mais derrière cette légèreté, tous les habitants de ce livre ont leur complexité et sont incarnés de façon admirable. Les lecteurs naïfs (dont je suis) peu habitués à rencontrer des personnages aussi peu manichéens, sont bernés et éprouvés par l'auteur. Les mariages sont tous désastreux, les amitiés parfois très malsaines. S'il semble impossible de comprendre Isabel à première vue tant ses décisions semblent absurdes, une prise en compte du décalage entre ses aspirations, ses prétentions, ses faiblesses et ses traditions ne peut que conduire au destin qui est le sien. De même, des personnages comme la comtesse Gemini et Henrietta Stackpole se révèlent bien moins superficielles et stupides qu'elles n'y paraissent ou le clament.
" - Quelle dommage qu'elle soit si charmante, déclara la comtesse. Pour être sacrifiée, la première venue aurait fait l'affaire. Pas besoin d'une femme supérieure.
- Si elle ne l'était pas, votre frère ne l'aurait jamais regardée. Il exige ce qu'il y a de mieux. "
Et si Mrs Touchett a ses défauts, sa dernière phrase au sujet de la maternité m'a brisé le coeur.
J'aimerais vous citer tous les passages que j'ai notés. Chaque phrase de ce roman est un bijou. Chaque mot est à la bonne place pour produire l'effet voulu. Jusqu'à la dernière page (quelle fin !!! ). Il y a de la répartie, de l'humour, toute une palette de sentiments, des descriptions grandioses. On compare parfois James à un peintre, la lecture de ce livre m'a également donné cette impression.
" Le vieux gentleman assis près de la table basse était arrivé d'Amérique trente ans plus tôt ; il avait apporté avec lui, dominant tout son bagage, sa physionomie américaine. Non content de l'avoir apportée, il l’avait entretenue dans un état parfait, de telle sorte qu’il aurait pu la ramener en toute confiance dans son pays natal, en cas de nécessité. "
James est donc un peintre de la physionomie et de la psychologie humaine, mais aussi un peintre des lieux qu'il nous fait visiter. L'Italie surgit sous sa plume. Je suis retournée dans les ruines de Rome et à la Galerie des Offices. J'ai senti la douceur de Florence; l'amertume de Rome et le temps pour le moins changeant (mais tout aussi délicieux à mon goût) de l'Angleterre.
Un livre qui m'a fait rire, qui m'a enchantée, bouleversée et révoltée à la fois. L'une des meilleures recettes pour faire un chef d'oeuvre. Lisez-le !
Les avis de Dominique et Keisha.
10/18. 689 pages.
Traduit par Claude Bonnafont.
1880 pour l'édition originale.
L'âge difficile - Henry James
M. Longdon, un vieux gentleman, renoue avec la vie londonienne. C'est ainsi qu'il devient le protecteur de Nanda Brookenham, la petite-fille de la femme qu'il a passionément aimée autrefois. Celle-ci s'apprête à faire son entrée dans le monde, un monde odieux.
Dire que cette lecture a été laborieuse est un sacré euphémisme. Pour résumer la situation, lorsqu'on me demandait de quoi parlait ce roman, j'étais très embarassée. Il est très difficile à résumer, et on ne peut pas le lire distraitement sans devoir tout reprendre pour saisir les allusions ultérieures.
Nous entrons en tant que simples témoins dans les discussions de tout un cercle de connaissances (je n'ose écrire amis). Ils parlent essentiellement d'amour, de liaisons et de mariages, le tout sur fond d'argent, de pédanterie et de vieux souvenirs. Si ce résumé fait de prime abord penser à Edith Wharton ou à tout autre auteur ayant fait des discussions de salon son sujet principal, il n'en est rien tellement la forme est différente.
Ici, les personnages, qui semblent être des gens très respectables dans un premier temps, deviennent tous plus méprisables les uns que les autres au fur et à mesure que l'on saisit leurs sous-entendus. Là où d'autres utilisent un narrateur pour expliciter la situation, James laisse son lecteur saisir l'essence de ses personnages directement à la source, en leur servant des dialogues d'une très grande finesse (parfois un peu trop pour une lectrice pas toujours concentrée telle que moi) et en abondance.
Cet art des dialogues est vraiment ce qui a retenu mon attention même s'il rend les personnages trop mécaniques dans leur attitude à mon goût. On se croirait devant une pièce dont les acteurs récitent le texte d'un voix monocorde. Les choses dont il est question sont évoquées avec une grande froideur ou une passion qui sonne complètement faux. J'ai été destabilisée par l'absence totale de gestuelle, ou d'indications sur le ton employé pour prononcer les dialogues (j'ai l'air d'une folle en reprochant à un livre de ne pas avoir de son et d'image...).
En raison de ce manque de repères, j'ai attendu vainement des indices pour comprendre. Je pensais que la fin éclairerait tout, mais je dois me contenter de supposer quels sont les personnages que James veut sortir du lot et le message qu'il transmet.
Je suis déçue mais pas vaincue. Henry James est un auteur qui me résiste alors que je voudrais l'apprécier. J'ai trouvé ce livre interminable. Pourtant, je suis paradoxalement convaincue d'avoir eu affaire à un très grand auteur, le genre que l'on savoure quand on a enfin compris comment pénétrer dans son univers.
Je remercie Célia et les éditions Denoël pour ce livre.
Denoël. 571 pages.
Traduit par Michel Sager.
2015 (1889 pour l'édition originale).
Les Papiers de Jeffrey Aspern ; Henry James
J'ai découvert Les Papiers de Jeffrey Aspern dans le cadre des lectures un peu fantastiques que je fais depuis quelques temps. La préfacière des Contes et récits d'Hawthorne le cite, et il n'en fallait pas plus pour me convaincre.
En fait, il n'y a pas de surnaturel dans cette histoire. Juste des êtres à l'esprit particulièrement aiguisé (ce qui est déjà suffisant chez un auteur comme James).
Jeffrey Aspern, un poète très célèbre au XIXe siècle, déchaîne les passions même après sa mort. L'un de ses admirateurs consacre ainsi son temps à rechercher des indices lui permettant de retrouver, de saisir Aspern. Accompagné par un autre passionné, il parvient à mettre à jour nombre d'événements de la vie du poète, mais il reste insatisfait. En effet, il sait qu'une vieille femme, Mrs Bordereau, établie à Venise, a été le grand amour d'Aspern, et qu'elle possède nombre de documents inédits et remplis d'informations.
Mais Mrs Bordereau refuse de céder ces documents, niant jusqu'à leur existence. Pour parvenir aux papiers d'Aspern, le narrateur imagine donc de s'introduire chez la vieille dame et la nièce de cette dernière en prenant pension chez elles.
Les Papiers de Jeffrey Aspern n'a pas la force du Tour d'écrou ou de Daisy Miller, mais j'ai pris beaucoup de plaisir à la lecture de ce texte.
Il parle d'art, d'héritage, d'amour d'un personnage, et de ce que cela implique. "Hypocrisie, duplicité, voilà mon unique chance. J'en suis bien fâché, mais il n'y a pas de bassesse que je ne commette pour l'amour de Jeffrey Aspern." On a tous égoïstement été horrifié d'apprendre que tel auteur (ou son entourage) avait détruit des documents dévoilant des aspects de sa personne qu'il désirait ne pas partager, parce que certains individus sont pour nous presque des proches. Notre narrateur (qui lui n'assume pas même son vrai nom) est en même temps assez contradictoire. Il veut tout obtenir parmi les documents de l'objet de son étude, mais il a du mal à accepter les éléments qui ne collent pas avec son idée personnelle d'Aspern. Ainsi, la personnalité de Mrs Bordereau le perturbe beaucoup. Elle cache ses yeux (vanité ou symbole peut-on se demander), ne dissimule pas son besoin d'argent, ce qui la rend différente de l'image que le narrateur avait de la femme aimée d'Aspern.
Notre narrateur n'est pas un personnage très sympathique, et il a en face de lui une vieille dame qui semble également pleine de ressources. "Elle était une si subtile vieille sorcière qu'on ne savait jamais quelle attitude prendre avec elle." Entre eux, la nièce de Mrs Bordereau, l'insignifiante Tina, qui mène une existence morne auprès d'une tante qui l'affectionne de façon étrange et qui tombe très vite sous le charme de son pensionnaire. La psychologie de ces trois individus est parfaitement exposée, et constitue le noyau central du roman. Tous révèlent, dans cette lutte acharnée pour leur propre bien-être, une personnalité bien plus consistante (et sans doute pathétique) qu'au premier abord. La fin est cruelle, assaisonnée d'une ironie encore plus rageante.
Le tout se déroule dans l'étouffant été vénitien, avec ses palais parfois en ruines et ses gondoles. L'endroit idéal pour assister au spectacle donné en l'honneur des papiers d'Aspern.
Les avis de Dominique et Papillon.
Le Livre de Poche ; 188 pages.
Traduit par M. Le Corbeiller.
The Aspern Papers. 1888.
Le Tour d'écrou ; Henry James
Librio ; 155 pages.
Traduit par Jean Pavans.
The Turn of the Screw. 1898.
Au moment de Noël, un groupe d'amis se réunit le soir autour du feu et se raconte des histoires terrifiantes. L'un d'eux propose soudain de livrer à ses amis un récit véridique, que lui a fait une femme qu'il a aimée bien des années auparavant. C'est elle qui prend le relais pour dire son histoire au lecteur. Après un entretien avec un jeune homme qui lui a fait une forte impression, notre narratrice, alors âgée d'une vingtaine d'années, est engagée comme gouvernante de deux enfants, à la condition de ne jamais solliciter son maître, leur oncle.
Arrivée à Bly, une magnifique demeure, elle rencontre d'abord l'adorable petite Flora, et se lie d'amitié avec l'intendante, Mrs Grose. La première contrariété que connaît la gouvernante est le renvoi du jeune Miles de sa pension. Cependant, lorsqu'il arrive à son tour à Bly, il est au moins aussi attachant que sa soeur, et il paraît impensable qu'il puisse avoir fait quoi que ce soit qui mérite qu'il se retrouve dans une telle situation.
Les choses deviennent définitivement inquiétantes lorsque les spectres de Miss Jessel, l'ancienne gouvernante, et de Peter Quint, un ancien domestique de Bly, apparaissent, et semblent menacer les enfants.
Lors de la fameuse soirée au coin du feu, Douglas s'interroge : "Si l'implication d'un enfant [dans une histoire d'épouvante] donne un tour d'écrou supplémentaire, que diriez-vous de celle de deux enfants... ? " Pour ma part, ce fait a sans aucun doute contribué à me faire un énorme effet.
Ce livre est un véritable bijou, qui joue sur toutes les ambiguïtés permises par sa construction. Le début du livre m'a fait penser à Jane Eyre, mais ici la menace semble venir de partout, et l'on sombre toujours plus loin dans le macabre. C'est la gouvernante qui nous raconte l'histoire, et alors qu'elle tente tout ce qu'elle peut pour protéger ses élèves, le lecteur voit plus loin derrière les sourires angéliques. Miles et Flora sont les êtres qui mènent la danse quand les adultes font des cauchemars. La situation est malsaine, et il faut attendre les dernières lignes pour comprendre à quel point.
En effet, la fin est magistrale, et l'on se moque bien que le récit de la gouvernante ait balayé tout le reste. J'ai lu ce livre fébrilement, incapable de le reposer avant de l'avoir achevé. Naturellement, j'ai été frustrée et encore plus déconcertée, comme le savent tous ceux qui ont déjà lu ce texte. Généralement, les textes "effrayants" du XIXe siècle ne m'impressionnent pas par leur capacité à avoir conservé cette dernière caractéristique. Mais Henry James jongle tellement bien avec l'esprit humain que cette fois-ci, je n'avais pas l'impression d'avoir davantage de recul qu'un lecteur de la fin du XIXe siècle. Si vous ne connaissez pas ce chef d'oeuvre, jetez-vous dessus !
Les avis de Nibelheim, de Sylvie, de La liseuse, de Tamara, de Dominique, et d'autres sur BOB...
Cécile a lu la BD qui a été tirée de ce texte.