Les Grandes Espérances ; Charles Dickens
Folio ; 741 pages.
Traduction de Sylvère Monod. 1861.
VO : Great Expectations.
Petite, j'ai découvert l'univers de Dickens avec la version Disney de Un chant de Noël, puis avec une version animée d'Oliver Twist, que j'ai visionnée un nombre incalculable de fois. Je crois même que j'ai lu une version abrégée de David Coperfield. Je garde un très bon souvenir de ces expériences, mais pourtant je me suis toujours enfermée dans l'idée que Dickens était un auteur déprimant. Seulement, il se trouve qu'une de mes profs nous a vivement conseillé de lire des classiques du XIXe. Tâche absolument terrifiante quand on me connaît...
Bref, du coup j'ai dressé un inventaire des romans concernés que j'avais en stock, ce qui m'a amenée à déterrer ce livre que j'avais acheté après avoir dévoré La Foire aux Vanités de W.M. Thackeray (que je me permets de vous conseiller une nouvelle fois).
L'histoire est celle de l'apprentissage de la vie de Pip, un petit garçon élevé "à la cuillère" par une soeur très rude et le généreux mari de celle-ci, Joe. Alors qu'il n'a que sept ans, il rencontre un forçat qui lui demande de l'aide en le menaçant. Très vite, le mystérieux homme est rattrapé et remis en prison.
Un peu après, Pip est invité chez Melle Havisham, une vieille dame brisée, qui n'a pas quitté les reliques de son mariage avortée des années auparavant. Il y rencontre Estella, la fille adoptive de Melle Havisham, dont il tombe amoureux, mais qui n'a été formée qu'à dédaigner les hommes.
La vie de Pip bascule finalement lorsqu'il apprend qu'un bienfaiteur a mis de l'argent à sa disposition pour qu'il devienne un gentleman. Il quitte donc Joe et sa soeur pour mener une vie à la fois à Londres et chez son tuteur, qui se trouve être un parent de Miss Havisham.
Je crois que j'avais oublié à quel point certains classiques sont légers. J'ai eu un certain nombre de coups de coeur ces dernières semaines, et au moins deux romans font désormais partie de mes incontournables, mais la plupart n'étaient pas franchement réjouissants. Ici non plus les choses ne sont pas faciles, ne vous méprenez pas. Mais cela n'empêche pas le roman d'être rempli d'humour. J'ai tout simplement adoré la façon dont Dickens nous présente les choses de façon à rendre des situations embarrassantes cocasses. Dès le premier chapitre par exemple, Pip est brutalisé par son forçat qui lui met la tête en bas, et lui fait ainsi voir son village à l'envers. Au lieu de dire que Pip est finalement reposé, Dickens écrit : "Quand l'église revint à elle..." J'imagine que dit comme cela, c'est difficile de voir ce qu'il y a d'amusant là-dedans, mais je vous assure que je me suis délectée de toutes les scènes de ce genre. Je pourrais dire de même des scènes où les personnages répètent plusieurs fois la même chose, et (encore des méchancetés à l'égard de ce pauvre homme) des scènes où Joe tente de faire des manières.
J'aime les romans où les personnages sont complexes, et difficile à détester même s'ils sont parfois odieux. Miss Havisham en est un très bon exemple. Ses projets sont diaboliques, c'est une femme amère voire cruelle, mais sa perspicacité à l'égard des vautours qui rodent autour d'elle et ses blessures la rendent attachante. A l'inverse, un Joe pourtant incroyablement généreux et sympathique toute la première partie du livre, devient lassant.
Ceci d'autant plus que c'est Pip qui nous raconte l'histoire, et que Dickens tend à nous démontrer à travers ce personnage à quel point on peut creuser un gouffre entre soi et les personnes que l'on aime vraiment sans rien faire pour l'empêcher.
Il y a quelque chose d'enfantin dans ce roman. Je ne sais pas si c'est parce que le héros est encore un petit garçon lorsque débute l'histoire, mais malgré certaines scènes, je trouve que l'univers dans lequel nous sommes plongés a un côté merveilleux. La maison de Miss Havisham et le Château de Wemmick (sans parler de son mariage) sont de bons exemples de ce que je veux dire.
J'ai bien conscience que mon billet n'est pas du tout à la hauteur du livre, que je pense conserver pour les moments où j'aurai envie de revoir le petit Pip.